Critique | Musique

Dinosaur L – 24→24 Music

DANCE UNDERGROUND | Génie méconnu, protéiforme et iconoclaste, feu Arthur Russell se fait coffrer en période « disco ». La réédition de 24-24 Music rend hommage à l’un des pères spirituels de !!! et LCD Soundsystem.

Dinosaur L, 24→24 Music, distribué par Traffic. ****

Quand le Sida l’envoie chauffer les pistes du paradis et faire danser Saint-Pierre le 4 avril 1992, Arthur Russell n’a que 40 ans mais laisse derrière lui un bon millier de bandes d’enregistrement. Figure mythique du New York underground, il a accompagné les chants et les poésies d’Allen Ginsberg au violoncelle. Collaboré avec quelques-uns des plus grands expérimentateurs de son temps: Philip Glass, Rhys Chatham, David Byrne (Talking Heads)… Et même bossé avec des producteurs disco comme François Kevorkian et Larry Levan.

Personnage étonnant né dans l’Iowa en 1952, le roi Arthur, qui a en son jeune temps vécu dans une communauté bouddhiste et étudié la musique des Indiens d’Amérique du nord, devient même sous les pseudos de Loose Joints et Dinosaur L (dont il est question ici) une égérie arty de la scène disco underground. Il léguera d’ailleurs une oeuvre fourmillante entre dance et avant-garde.

Disco Jam

Dans les années 70, Arthur Russell, gay, est proche des DJ’s David Mancuso, Tom Moulton et autres Nicky Siano qui expérimentent dans leur légendaire Loft et Gallery new-yorkais avec le funk et le disco et posent les jalons de la dance music moderne. Les 27 et 28 avril 1979, alors que le disco n’est pas vu d’un bon oeil par les intellos, Arthur Russell invite Mustafa Ahmed (congas), Jeff Berman (batterie), Julius Eastman (clavier), Peter Gordon (saxophone), Rome Neal (percussions), Larry Saltzman (guitare) et Peter Zummo (trombone) à le rejoindre pour une disco jam orchestrale du côté de The Kitchen. Salle destinée à présenter les créations contemporaines d’artistes expérimentaux (Steve Reich, Glenn Branca, Laurie Anderson…).

Ces soirs-là, la smala improvise en vue de créer un groove continu, évolutif. Et le 9 juin, Russell peut enregistrer son 1er album sous le nom de Dinosaur L. Disque qu’il ne sort que 3 ans plus tard sur Sleeping Bag Records, le label qu’il fonde avec l’entrepreneur Will Socolov.

A nouveau réédité aujourd’hui dans un joli coffret, accompagné de morceaux mis en boîte sous les pseudos Felix ou encore Indian Ocean, 24-24 Music est un album sur ressorts. Un trampoline sonore troué. Une machine à danser qui tourne folle. Certains prétendent qu’Arthur, qui aimait se créer ses propres obstacles au point de frustrer collaborateurs et entourage, n’est jamais arrivé à une version définitive de quoi que ce soit. D’autres affirment que sa quête n’était pas de parvenir à un produit fini, mais plutôt d’explorer différents modes d’expression musicale. Le résultat en tout cas est irrésistible et l’écoute de 24-24 Music vous permettra de (re)découvrir un de ces types à qui !!! (Chk Chk Chk), LCD Soundsystem, The Rapture et autres trublions du label DFA ont tout pompé. Vous ne terminerez bientôt plus une fiesta sans avoir passé Go Bang! ou You’re Gonna Be Clean On Your Bean…

Julien Broquet

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