Critique | Musique

Dedicated to Bobby Jameson, du Ariel Pink grand cru

Ariel Pink © Eliot Lee Hazel
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Le plus dérangé des beautiful losers californiens voyage dans l’histoire de la pop et dédicace son nouvel album à Bobby Jameson, l’un de ses héros oubliés.

Quand on parle de beautiful loser, Ariel Pink n’est jamais bien loin. Après avoir enregistré Ku Klux Glam avec R. Stevie Moore et travaillé avec Kim Fowley sur son album Pom Pom, voilà que Mister Pink dédie son nouveau disque à Bobby Jameson, héros perdu et destin invraisemblable détruit par l’industrie du disque, jusqu’ici boudé par l’histoire du rock’n’roll. Une anecdote résume mieux le parcours chaotique du personnage qu’un long discours. On est en 1965. Le chanteur Chris Ducey a enregistré un disque et Randy Wood qui l’a signé (ou du moins pense que c’est le cas) a déjà fait imprimer plusieurs milliers d’exemplaires de la pochette (le visage de Brian Jones) quand le deal tombe à l’eau. De fil en aiguille, il contacte Jameson en lui demandant d’enregistrer des chansons qui colleront aux titres. L’imprimeur trafiquera pour que le D devienne un L et que Chris Ducey se transforme en Chris Lucey. Fabriqué avec le producteur Marshall Leib (qui était dans le premier groupe de Phil Spector), Songs of Protest and Anti-Protest devient culte parmi les fans de folk. Mais on n’est pas encore à l’ère d’Internet et des réseaux sociaux, le singer-songwriter l’a commis sous un faux nom. Et de raconter ses déboires sur un blog, 40 ans plus tard, en même temps que ses tentatives d’obtenir quelques royalties… Chienne de vie, certes. Surtout si on y ajoute came, alcool et tentative de suicide. Pas étonnant que ce weirdo d’Ariel Pink se soit pris de passion pour le bonhomme (mort en 2015 à l’âge de 70 ans) et lui dédicace son nouveau disque.

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« Une manière de détourner l’attention plus qu’un fil rouge », dit-il. Disque thématique ou pas, Dedicated to Bobby Jameson est à nouveau un grand cru. Une collection de tubes dont Ariel a le déglingué secret. Moins foufou et décousu que Pom Pom mais toujours marqué par son amour de la pop song, qu’elle date des années 60, 70 ou 80. L’ambiance est plus eighties qu’autre chose et les chansons restent collées à l’oreille. Mais les références et les clins d’oeil sont nombreux. Le Californien se la joue Morrissey pour rendre hommage à The Cure (Feels Like Heaven). Time to Meet Your God semble s’adresser à Gary Numan. Dreamdate Narcissist sonne comme une relecture du Pushin’ Too Hard des Seeds. Là où Time to Live se prend pour Video Killed the Radio Stars des Buggles… La mélodie chez Ariel Pink a l’évidence désarmante. Le passé assumé et revisité. Another Weekend plonge dans la béatitude. Le contagieux Bubblegum Dream va jouer dans un Luna Park avec la candeur des Beach Boys. Tandis qu’Acting parachève le travail avec Dam-Funk façon Prince ou sans doute plutôt le Midnite Vultures de Beck. Du haut de son étrange arc-en-ciel, Ariel Pink promet d’encore vous en faire voir de toutes les couleurs…

Ariel Pink, Dedicated to Bobby Jameson, distribué par Mexican Summer/V2. ****

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