Couleur Café: de Snoop Dog à Baloji, business et bon esprit

© Philippe Cornet

Mission accomplie. Avec 76.000 spectateurs, Couleur Café a attiré à nouveau la grande foule, sold out deux jours sur trois. Avec côté météo, un carton plein, et côté foot, les Allemands qui gagnent à la fin: un grand classique, somme toute.

Samedi, Patrick Wallens revenait encore sur la pertinence d’une tête d’affiche comme Snoop Dogg. Pas forcément raccord avec l’esprit Coul Caf’, le rappeur US? Peut-être, répondait le directeur du festival, mais si cela permet de programmer par ailleurs une affiche plus « difficile »… Snoop comme attrape-spectateurs donc. Et pourquoi pas? Lui-même venant pour « cachetonner » et repartir aussi vite. Et tout le monde de s’y retrouver.

Surtout que, tout compte fait, rien de tel qu’un Drop It Like It’s Hot ou un vieux classique comme Gin & Juice pour faire décoller un samedi soir. Le gaillard a beau arriver 20 minutes en retard, une fois sur scène, il fait le boulot, épaulé par un vrai groupe. A la cool, certes, et sans surprise (un passage west coast, un autre pour les « ladies », l’hommage obligé au camarade Tupac…), mais avec assez de hits pour assurer le paaaaaarty time, biyatch ! Un bon chienchien, finalement, le Snoop.

En général, le parti-pris hip hop plus affirmé de cette année a d’ailleurs bien fonctionné. Dimanche, le rap montrait même qu’il pouvait aussi parfois s’aventurer plus loin que ses clichés bling bling ne pourraient le laisser penser. Par exemple quand Nas s’allie avec Damian Marley, le fils de l’autre, pour un projet aux relents panafricanistes inédits. Le CD est intitulé Distant Relatives, et sample aussi bien l’Ethiopien Mulatu Astatke que le Sabali d’Amadou et Mariam. Parfois gâté par ses bonnes intentions, le projet donne sur scène un des meilleurs moments du festival. Un « feel good » concert, drivé par un band reggae en bonne et due forme, où le mélange entre le phrasé rap de Nas et celui chanté de Marley s’allie parfaitement. Chacun y va aussi de son passage solo, mais pour mieux se retrouver par la suite. Par exemple, autour d’une cover fédératrice du père Marley (War, Exodus).

De son côté, c’est Waiting in Vain qu’Hindi Zahra a choisi de reprendre. Pour sa première participation à Couleur Café, la Marocaine s’est directement retrouvée sur la scène Univers. Il faut dire qu’elle a le charisme pour, s’agitant d’un bout à l’autre du concert. Ce qui lui permet d’alterner les langues (anglais, français, berbère) et les genres avec une facilité déconcertante. On la trouve ainsi un plein trip rock, solo de guitares à l’appui, pour la voir ensuite se déhancher sur une simple guitare acoustique arabisante, puis laisser un clavier partir dans un solo presque jazz. S’il lui manque peut-être encore une ou deux chansons marquantes, Hindi Zahra a en tout cas montré qu’elle a du caractère.

Du caractère, Baloji n’en manque pas non plus. Il en a fallu notamment pour monter sa récente tournée au Congo. De retour en Belgique, le rappeur retrouvait une scène qui lui permettait de compléter son dispositif scénique avec des danseurs et des cuivres en plus. Son récent Kinshasa Succursale, relecture « à la congolaise » de son Hotel Impala, le vaut bien. A quelques jours du cinquantenaire de l’indépendance du Congo, le propos du bonhomme n’a même jamais semblé aussi pertinent. Alors le son a beau ne pas toujours suivre les digressions musicales de l’orchestre de la Katouba, le discours de Baloji fait lui toujours sens. Par exemple quand il dédie un Tout ça ne nous rendra pas le Congo au militant des droits de l’Homme Floribert Chebeya, récemment assassiné.

Ou comment allier festif et réflexion. Tiens, c’est pas justement l’esprit de Coul’ Caf’, ça ?

Laurent Hoebrechts

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