U2 au stade Roi Baudouin comme à la parade

© Belga

Premier des deux concerts de la bande à Bono, au Stade Roi Baudouin, mercredi soir. Impressions.

U2 en 2010, c’est d’abord une drôle de setlist. Cela fait 30 ans que le groupe irlandais sort des disques, et aujourd’hui on a parfois l’impression qu’il court dans sa discographie comme une poule sans tête.

Mercredi, au Stade Roi Baudouin, comme sur les dates précédentes, U2 a ainsi débarqué sur scène, toutes lumières allumées, en entamant un nouveau morceau, Return Of The Stingray Guitar. Une anecdote électro-rock dont on ne perçoit pas bien l’utilité, sinon de renforcer l’impact de Beautiful Day, vrai début du concert, enchaîné à un I Will Follow strident pondu quand même 20 ans plus tôt.

Logiquement, U2 insiste aussi sur les derniers albums (Magnificent, Elevation, Vertigo, City of Blinding Lights…), même si aucune des trois plaques sorties durant les années 2000 ne s’est révélée vraiment marquante. Cela tourne rond, machine parfaitement huilée, mais qui ne décolle jamais tout à fait. Ce n’est pas forcément entièrement la faute des Irlandais: voir un concert en 2010, c’est souvent déjà connaître la liste et l’ordre des morceaux à l’avance, dégotés en deux clics sur le Net. Quand comme U2, on n’a pas tout simplement déjà sorti un DVD de la tournée en cours…

On connaît donc déjà par coeur les astuces et les trucs scéniques du jour, le passage obligé par la case « engagement humanitaire », avec la vidéo de Mgr Desmond Tutu avant One, ou l’hommage à Aung San Suu Kyi ou au mouvement contestataire en Iran.
La bonne idée tout de même: ressortir Miss Sarajevo, Bono reprenant à son compte la partie de Pavarotti (et, c’est bête, mais il se passe malgré tout quelque chose quand le bonhomme tient la note, hurlant l’amore: on y croit).

A l’opposé, le pire est atteint en fin de concert avec une abominable séquence « dance », Larry Mullen Jr se baladant sur la scène avec un djembé sur I’ll Go Crazy If I Don’t Go Crazy Tonight. Cela ne ressemble pas à grand-chose, s’avère tout à fait inutile, voire complètement ridicule. De toutes façons, tout le monde le sait: les Irlandais ne savent pas danser.

On a pas mal parlé de la scène, structure arachnéenne baptisée « the claw », et made in Belgium: Bono le soulignera longuement (« Belgians bring technology, Belgians bring beers »). C’est vrai que le montage est impressionnant. Après un quart d’heure pourtant, le dispositif scénique a déjà l’air d’avoir épuisé toutes ses possibilités. La tournée a été baptisée 360°, mais le gimmick n’apporte pas grand-chose, Bono s’épuisant un peu vainement à tourner autour de la scène. Comme si le groupe tournait en rond?

Mercredi soir, on a en tout cas souvent eu l’impression de voir U2 coincé dans une logique. Ou dans des envies contradictoires: de prendre encore des risques d’un côté, et plaire à tout prix de l’autre. Cette contradiction a longtemps fait la force d’un groupe comme U2. L’un des sommets de la soirée de mercredi fut d’ailleurs Until The End Of The World, morceau désenchanté par excellence qui résume bien les tensions internes au band, à leur son même (le crooning de Bono d’un côté, la guitare particulièrement acérée de The Edge de l’autre). Si c’est dans ces moments-là que U2 reste souvent le plus intéressant, ils se font aussi de plus en plus rares.

Reste une poignée de chansons insubmersibles qui assurent à elles seules la montée d’adrénaline nécessaire pour emballer un stade: One joue ce rôle, I Still Haven’t Found What I’m Looking For, Where The Streets Have No Name ou With Or Without You également. Malgré la concurrence de plus en plus vive (Muse?), et même si cela leur coûte, U2 continue ainsi à justifier son titre de groupe phare d’un genre en soi: le stadium rock. Après tout, rien de plus normal: ils l’ont inventé.

Laurent Hoebrechts

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