Jay Z/Kanye West, un trône pour deux

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Dimanche soir, en concert au Sportpaleis d’Anvers, les deux rappeurs ont assis leur domination. That shit cray!

Les rôles sont bien définis. À ma gauche, Kanye West, le petit teigneux, qui remue sans cesse, impossible à tenir en place. À ma droite, Jay Z, le patron, relax, smooth, profil de tortue, mais allure de ninja: un mouvement d’épaule, un sourcil qui pivote, pour tout effet de scène. Cela doit s’appeler le charisme…

On l’a encore vu, de nos yeux vus, dimanche, sur la scène du Sportpaleis anversois: les deux rappeurs sont bien au sommet de la planète hip hop. Et plus encore: à voir le public, pour une fois vraiment mélangé, entre fans hardcore, trentenaires branchés, kids à casquettes… Tous venus pour assister à la parade royale, célébration en grandes pompes de l’esprit de réussite, de l’entrepreneuriat black. Ils n’auront pas été déçus, avec 2h30 de show « hénaurme », ne laissant que peu de répit. C’est la stratégie du harcèlement: tubes après tubes, ne rien lâcher, tenir la prise, jusqu’au feu d’artifice final. De l’entertainment à l’américaine, dans ce qu’il a de plus efficace, mais aussi de plus brillant et inventif. Même la sono pourrie (Sportpaleis, remember?) n’aura pas réussi à gâcher le festival…

Sur le coup de 20h40, les deux camarades lancent ainsi la machine, chacun perché sur de gros cubes, sur lesquels défilent des vidéos. Après H.A.M et Who Gon Stop Me, le DJ balance Try A little Tenderness d’Otis Redding: sur la scène, un gigantesque drapeau US a été déroulé, devant lequel se retrouvent Jay Z et Kanye West. Plus rien ne pourra les arrêter. À côté des titres de Watch the Throne, l’album commun, chacun va fouiller dans ses cartons persos. À ce moment-là, c’est un classique après l’autre. Après une heure, un premier ralentissement: le seul. Les deux rappeurs s’asseyent sur les marches de la scène: New Day, avec le sample de Nina Simone, puis Hard Knock Life, le premier carton historique du père Hova. Ce dernier enchaîne avec Izzo, et c’est reparti. Big Pimpin’, Dirt Off Your Shoulder, All of the Lights, Runaway, Heartless, Touch the Sky, pour le père Kanye, gourmand, affamé même. L’assaut final? Gold Digger, enchaîné à 99 Problems.

À ce moment-là, alors qu’une quarantaine de titres ont déjà mitraillés, ses Altesses royales se posent deux secondes, dos au public, fixant les écrans géants: What A Wonderful World de Louis Armstrong sert alors de bande-son ironique à un collage d’images d’actu: l’ouragan Katrina, un gamin en tenue du KKK, des SDF victimes de la crise des subprimes… Les images d’insurrection du clip de No Church in the Wild (réalisé par Romain Gavras) enfoncent le clou. Voilà pour le moment « conscientisation », qui ne coûte pas grand-chose. Mais qui ne dupe pas grand-monde non plus… Les idoles bling bling terminent d’ailleurs avec l’hymne N*** in Paris. L’histoire d’une virée parisienne en mode luxe et déglingue show off. Le titre est attendu. Il est imparable, électrisant définitivement le Sportpaleis. « Si vous aviez échappé à ce à quoi j’ai échappé, vous seriez aussi complètement défracté dans une ville comme Paris », se justifie Jay-Z. En concert à Paris justement, quelques jours avant, le duo l’avait enchaîné 11 fois de suite. À Anvers, le public devra se « contenter » de 6 exécutions. Petits joueurs…

Laurent Hoebrechts

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