Comment est-ce possible d’enregistrer une reprise d’un morceau qui n’existe pas encore?

© One Horse Land
Kevin Dochain
Kevin Dochain Journaliste focusvif.be

Pour Covers of the Future, les Bruxellois de One Horse Land ont fait reprendre leur futur single par 10 groupes qui ne l’avaient encore jamais entendu. Et présenteront leur version sur scène, bien entourés, ce vendredi chez Balades Sonores. Explications avec Jérémie Fraboni, chanteur et cousin éloigné du Doc Emmett Brown.

On a tendance à l’oublier, mais avant l’avènement du disque microsillon au début du siècle passé, le principal vecteur d’échange de musique était la partition. Support que Beck a récemment remis au goût du jour avec son Song Reader et avec lequel les Bruxellois de One Horse Land se sont aujourd’hui beaucoup amusés. Pour ses Covers of the Future, le groupe a en effet envoyé la partition de son futur single, Interesting Times, comme une bouteille à la mer à destination de tout musicien qui voudrait le réinterpréter… sans l’avoir encore entendu.

L’appel fonctionne étonnamment bien: une dizaine de musiciens des quatre coins du pays, parmi lesquels les Wallons de Kings of Edelgran, la Flamande Leonore ou les Bruxellois de Goodbye Moscow mordent à l’hameçon et présentent autant de versions personnelles, électro, folk, rock ou psyché. Le tout sera compilé sur une K7 (« j’espère que ça incitera les gens à se replonger dans leur vieille collection ») qui, cerise sur le gâteau, sera présentée en concert, chez Balades Sonores à Bruxelles, avec une bonne partie des groupes présents sur la compile… Qui ne découvriront l' »original » que le soir même!

« Capital city of no one’s country »: avec une phrase d’accroche pareille, et presque un an pile après les attentats, difficile de ne pas penser à ceux-ci. Pas étonnant non plus que le morceau, même dans son plus simple appareil, ait parlé à autant de groupes. Dans Interesting Times, One Horse Land chatouille Bruxelles à travers le prisme d’une malédiction chinoise: « Les temps intéressants, pour un historien, c’est bien, mais quand on les vit, c’est autrement plus compliqué ». Un thème bien d’actualité, emballé dans un concept original et audacieux: on se devait d’aller tailler une bavette avec son instigateur, Jérémie Fraboni, chanteur et guitariste du groupe.

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Quelle est la genèse du projet Covers of the Future? Comment est venue l’idée?

Avant même qu’on enregistre notre album, je me suis demandé ce qu’on pourrait faire qui sorte de l’ordinaire et qui donne envie aux gens de nous écouter. À la base, c’est un aspect des choses qui ne me passionne pas. Je vois ça comme un stress, une source d’ennui. Comment tourner ça positivement? Qu’est-ce qui me motive dans le fait de faire de la musique? Avant tout, ce sont les chansons. Puis, le déclic: si je veux parler chanson, je dois m’adresser avant tout à d’autres musiciens. Montrer avec eux les secrets derrière les morceaux. Puis est arrivée cette idée de le faire avant que la chanson ne sorte: le jour où c’est arrivé, j’étais au boulot, j’avais du mal à me concentrer sur autre chose. Quand on a enregistré le morceau Interesting Times, on s’est dit que son texte, son univers, son arrangement, ses harmonies pourraient parler à différents styles de musique. On a écrit la partition, retranscrit le texte, posté le tout sur Internet, sans trop savoir qui allait répondre.

Qui s’est proposé? Il a fallu faire du tri parmi les « candidats »?

On n’a pas choisi. On était très emballés, mais on ne s’attendait pas à ce que ça prenne comme ça. On ne pensait pas en faire un mini-album avant l’album, avec une sortie officielle, sur un label… À la base, on pensait que ça allait être l’occasion d’avoir quelques chouettes vidéos pour nous et pour nos fans. Mais très vite, les deux premières versions qu’on a reçues (celles d’Autoreivs et de Goodbye Moscow) étaient déjà très arrangées, faites en quelques jours mais avec beaucoup de soin. On a aussi été chercher quelques personnes qu’on connaissait, mais la plupart des versions, comme celles d’Azerty ou Kings of Edelgran, ont été proposées spontanément… Quand on les a vues arriver l’une derrière l’autre, on s’est dit qu’il fallait les mettre en valeur, plus que simplement avec une vidéo sur YouTube.

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Vous n’avez pas eu peur que l’une ou l’autre cover surpasse l’original?

Très vite. On nous a beaucoup posé la question, d’ailleurs. Quand on mixait notre version, on recevait des reprises en même temps et ça a été une source d’angoisse relative. Je me suis dit plusieurs fois « j’aurais bien aimé avoir eu cette idée-là ». J’aime toutes les versions, et il y a des arrangements qui auraient pu convenir à la nôtre. Certaines personnes accrocheront peut-être plus à une version électro, une version à trompettes… Mais c’est le jeu. Je suis content si les gens peuvent trouver toutes les richesses cachées dans la chanson et ce que chaque groupe a pu lui amener comme personnalité.

Ce qui est remarquable, avec un concept pareil, c’est que le disque puisse s’écouter en entier sans provoquer l’ennui, à force de réécouter la même chanson… C’est pourtant plein de relief.

Au début, on a craint que tout se ressemble trop. Mais en voyant la variété des choses et en alternant les styles dans la tracklist, on s’est rendu compte que ça marchait bien.

Pourquoi le sortir en K7?

L’idée de faire une compile, ça rappelle le vieux format des K7 qu’on se faisait autrefois. À la base, l’idée était d’ailleurs de les copier nous-mêmes, mais comme on va en faire un nombre conséquent, on passe par une usine qui les fabrique en Angleterre. Ça convenait bien au format de la compile, et le fait qu’on la présente chez Balades Sonores, qui se spécialise dans les vieux formats, ça faisait sens. Notre graphiste s’est beaucoup marré à faire un truc rétrofuturiste, plein de fluo…

Référence évidente à Retour vers le futur

Quand j’ai eu l’idée, j’ai tout de suite eu envie de faire référence au film. C’est une bonne façon de faire comprendre le concept immédiatement, alors qu’il n’est pas forcément simple. Reprendre une chanson sans l’avoir entendue, c’est une sorte de paradoxe temporel.

La vidéo d’annonce est assez drôle et bien jouée. Un passé d’acteur?

À la base, je devais m’enregistrer de manière très sérieuse à la maison, en expliquant le concept devant un piano. Je ne suis pas hyper à l’aise en tant que comédien, mais mon métier dans le civil, c’est prof. Du coup, j’ai repris mes petites habitudes un peu doctes, et Audrey (Coeckelberghs, compagne et membre du groupe, ndlr) m’a poussé à forcer le trait. Blouse blanche, tableau noir: on l’a joué à fond!

One Horse Land, Covers of the Future. Release & showcase le 24 mars, chez Balades Sonores, 1210 Bruxelles. www.onehorseland.be

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