Black Mountain: la montagne sacrée

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Tenants d’un rock seventies à peine remis au goût du jour, les Canadiens de Black Mountain investissaient, mardi, l’Ancienne Belgique de Bruxelles. Back to the roots.

 » Black is the new pink « , nous lâchait, le sourire en coin, Alex Maas lors du passage de ses Anges Noirs en 2008 au Botanique, commentant ainsi la déferlante de groupes en  » black  » qui s’est abattue sur le landerneau du rock indépendant ces dernières années -de Black Heart Procession aux Black Diamond Heavies en passant par le Black Rebel Motorcycle Club, les Black Keys et autres Black Kids.

Hasard du calendrier, le retour, lundi soir, des Black Angels à Bruxelles -au Botanique, toujours- s’opérait pile la veille de celui de Black Mountain -à l’Ancienne Belgique, pour le coup-, la bande de chevelus canadiens emmenés par Stephen McBean. De quoi donner à la semi-boutade d’Alex Maas des allures d’oracle quasi divinatoire: la marée noire ne cesse de gagner du terrain.

Dans l’Orangerie du Bota, lundi, The Black Angels avaient livré un concert (presque trop) parfait, brassant dans un grand trip lysergique, appelé à culminer dans un rappel proprement délétère (Young Men Dead, The First Vietnamese War, Manipulation, tous au rendez-vous), les meilleurs titres de leur vicieuse discographie.

Difficile d’en dire autant de la prestation, inégale au possible, de Black Mountain mardi à l’AB, les Canadiens n’en finissant pas de jouer aux montagnes russes (« Buy a ticket for a fancy airplane / Won’t get you nowhere« , chantent-ils sur la bien nommée… Rollercoaster). La faute sans doute à un nouvel album, Wilderness Heart, à la production quasi mainstream, conférant aux moins bons titres de ce troisième opus studio des airs de hard FM taillé pour les stades.

Pour autant, on s’en tient invariablement à distance raisonnable d’une quelconque bouillie prog (avec des gros morceaux de Yes ou, pire, de Jethro Tull dedans). Dieu merci. Chef de file d’une passionnante nébuleuse vancouveroise, la Black Mountain Army, comptant également dans ses rangs Pink Mountaintops, Blood Meridian et autre Lightning Dust, Black Mountain a toujours puisé à vrai dire dans des influences à priori datées, voire ringardisantes, plongeant ses racines dans un rock seventies aux accents volontiers psychédéliques et progressifs.

Mais ce passéisme assumé, forcément sur le fil, se moquant de la notion même de goût -bon comme mauvais-, dénote surtout un refus de la branchitude tout à fait bienvenu. Particulièrement en temps de hype. Démonstration encore ce mardi à l’AB où, passée une intro aussi interminable que pompeuse (Eric Serra, es-tu là?), le groupe, tout en sobriété scénique, se concentre sur l’essentiel: la musique, en l’occurrence. Un profil bas des plus heureux qui n’en finit pas moins par déserter certains morceaux, gagnés par un lyrisme pour le moins discutable.

Et le groupe d’alterner ainsi, à une cadence quasi métronomique, passages à vide (un Let Spirits Ride boursouflé, des ballades à ronfler) et grands moments de rock’n’roll. Loin de torpiller la soirée, cette inconstance finit par donner un relief étonnant à des compos ne manquant ni de souffle, ni de coeur: les pics d’intensité (Tyrants, Old Fangs, Stormy High) atteints ponctuellement par le concert de ce mardi avaient ainsi, pour tout dire, des allures de sommets tout bonnement vertigineux. Logique, somme toute, quand on se nomme Black Mountain.

Nicolas Clément

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