Bête, méchant et boutonneux

Lundi, c’est Flanby. Malgré la pauvreté des propositions festives du week-end, notre chroniqueur Guillermo Guiz s’est quand même laissé entraîner dans les sueurs de la nuit. « Night in, Night out », épisode 37.

Ca commence par un paradoxe: à foule égale, comment se sentir parfaitement libre entre quatre murs et complètement oppressé au grand air? Enfermé dehors, titrait Albert Dupontel dans l’une des expressions cinématographiques de son génie et vendredi soir, sur le flanc royal du parc éponyme, la formule m’est apparue bien seyante. Que d’âmes, malgré la météo peine-à-jouir. Les Apéros urbains, décidément, sont parvenus à pénétrer au bulldozer les agendas bruxellois, à les annoter à l’encre de tes yeux: ceci marque véritablement le début des beaux jours, qu’on se le dise. D’autant que Carl de Moncharline, qui perd aussi facilement le Nord que son petit sourire narquois, avait couplé sa Fête des Voisins à la sauterie nomade et géante de François Lafontaine. Cette chronique n’engageant que son auteur, je peux le clamer sans haine, peine ou gêne: les Apéros urbains m’enquiquinent effroyablement. Pas le concept (très chouette), ni le line-up (très correct), ni les gens (très des gens), ni l’extérieur en général (très naturel finalement, l’extérieur). Mais ma théorie, goupillée à la va-vite (à l’instant en fait) pour poursuivre ces lignes dans la bonne humeur, tient en deux lignes: contrairement aux avancées anonymes des clubs, la lumière du jour, même déclinante, oblige à déchiffrer pour de vrai les multiples visages croisés et inconnus. Ce qui, dans une capitale européenne, pousse au sentiment de solitude. Je dis n’importe quoi. Je dis n’importe quoi?

En plus, l’honnêteté m’y oblige: y’a beau avoir deux-milles meufs aux Apéros urbains, y’en a toujours qu’une pincée d’un peu funky-town. Et en général, c’est tes ex. Ou les miennes. Sifflets du public. Huées. Vouées aux gémonies. Ben quoi? In vodka veritas! Les nanas laissent les robes au dressing, les talons au clou et le make-up au… non, elles gardent le make-up, mais malgré tout, dans la lumière du jour, fini le bluff, plus question de s’endormir avec Sophie Marceau pour se réveiller avec Richard Anconina (comme disait l’autre), non, dans la lumière du jour, tu passes direct à la case Eddie Vuibert. Pour ça, nous, les garçons, sommes largement plus intègres sur la marchandise. Ca me fait penser, Francis, à cette fin de soirée délicate où une jeune femme, me découvrant enfin sous la caresse d’un soleil poupon, fit cette remarque horrifiée et lourde de déception: « T’as trois boutons sur le nez, t’étais mieux à l’intérieur. » Nous n’allâmes pas plus loin. Déjà parce qu’elle était moche, globalement, et puis aussi parce qu’il est vrai qu’en y regardant bien, les rayons naissant laissent entrevoir, sur ma peau blême, l’expression d’un bronzage admirablement distrait et j’ai trois boutons sur le nez. La marque de Satan.

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Ce sexisme de base n’est-il que l’expression d’un manque d’inspiration crasse? Probablement. L’amertume aussi. Non, mais sérieux, cela dit: aller seul aux Apéros urbains, ça te confronte aux vérités les plus carnassières, celles qui rient en buvant de la bière (on tombe dans le Barnum, Francis, pardonnez-moi). Perdu sur une île surpeuplée, métaphore absolue de l’existence en grande ville, tu es seul au monde. L’essentiel de tes potes, y compris Wilson, t’a planté comme un bulbe (c’est très chiant les Apéros urbains) et l’essentiel de la population présente t’est soit hostile, soit indifférente. En plus, pour le coup, le DJ semblait s’amuser comme un Khmer rouge en plein séminaire Amnesty International, gai comme un pinson déplumé, comme un Rudy Léonet en train de parcourir les chiffres CIM de Pure FM, à taper dur sur les baffles pour une centaine de drogués notoires. Et ça sent le churros avec ça (pic émotionnel de ma soirée)! Au final, j’ai tenu une quatorzaine de minutes, le temps de me trouver un plan B ou un plan C avant d’entamer la suite de ce week-end qui s’annonçait assurément bien pauvre. Les examens sont là, la relève de notre société apprend et approche, pleine des futurs diplômes qu’elle dispersera en voulant « travailler dans l’événementiel ». De l’événementiel momosexuel par exemple, comme au Mirano vendredi. Francis, tu aurais adoré.

Julie G, l’Everest et le Kilimandjaro dans le 95 E (approximation), gérait la guest-list pour cette soirée « The Time Machine », mise en sauce par la Simply Divine team. Avec un plan Chippendales sur le flyer. Gay friendly l’histoire, autant dire que personne ne se lâche vraiment. Les momos parce qu’on n’est jamais aussi bien qu’entre momos, les zétéros parce que les zautres zétéros sont accompagné(e)s, et l’ensemble parce que le Mirano est à moitié vide. Comme d’hab. Cela étant, Francis, tu aurais probablement bien liké le show dispensé sur l’énorme mur en Led, un show vidéo répondant aux mouvements des danseuses et danseurs cuivrés, pailletés et ciselés à la serpe qui s’ébrouaient sur les podiums. Quand j’ai vu le premier éphèbe, abdos en tuiles de toit, j’ai rapidement souhaité me jeter du balcon pour enfuir définitivement ma bedonnitude redoutable dans les catacombes de l’Histoire. Heureusement, par manque d’assistance, l’étage était fermé. Même repeint en rouge et noir, le Mirano reste trop haut de plafond pour une triple centaine de fêtards. Ca sonne creux. Cela dit, intelligemment mitonné dans la configuration nostalgique du Café Dirty, le warm-up m’a replongé dans les années collèges où j’allais, survêt vintage et cheveux ironiques, sautiller dans ce qui était encore une légende. Au Café Dirty, tout le monde pouvait potentiellement entrer. Tout le monde. Rideau.

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Guillermo Guiz

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