Critique

Dandy Dungeon, le chant du cygne du gaming nippon?

Dandy Dungeon: Legend of Brave Yamada © Onion Games
Michi-Hiro Tamaï Journaliste multimédia

Grotesque, drôle et féroce, Dandy Dungeon met en abyme le processus créatif d’un game designer japonais esseulé.

Le Japon n’est plus une terre promise de jeux vidéo. En perte constante de blockbusters doués depuis 20 ans, le pays qui favorise l’esprit d’équipe aux individualités peine également à se reconvertir dans la vague indé. Dandy Dungeon se dresse donc à plus d’un titre comme un projet rare sur l’archipel. Créé par Yoshiro Kimura (1), ce jeu de rôle parodique évolue non seulement hors du système mais ranime également un non-sens ludique typiquement nippon. Le titre partiellement autobiographique s’enferme ainsi dans le danchi (2) minable et la psyché bordélique de Yamada, trentenaire moustachu qui vient de se faire virer de son studio de développement.

Vissé sur sa chaise, ses cheveux se dressent lorsqu’il accélère sa frappe au clavier pour coder le jeu de sa vie. Yamada laisse sa porte ouverte à de parfaits inconnus et à une foule d’entrées fracassantes lorsqu’il développe Dandy Dungeon. Une vendeuse de légumes bio adepte de SM. Un voisin armé d’un couteau en quête d’onigiri (3). Mais aussi, un indien enturbanné qui affirme que les gamers ont « besoin d’un niveau égyptien ». Ces scènes de vie généreusement grotesques et poétiques nourrissent le jeu que Yamada développe. Et ce dernier de placer son ex-boss vérolé au bout d’un donjon…

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Non content de décortiquer le processus créatif du game designer en suivant sa vie, Dandy Dungeon plonge aussi dans une vertigineuse mise en abyme où le joueur essaye le titre (éponyme) créé sous ses yeux. Le quatrième mur est abattu. Et on multiplie les explorations de donjons médiévaux fantastiques créés pour conquérir le coeur de Maria, sa voisine. Dans les faits, il s’agit simplement de tracer au doigt un itinéraire à travers un labyrinthe 2D, aux airs de Pac-Man.

Par ici la sortie

Simple au début, le principe qui demande de rejoindre la sortie s’étoffe brillamment par la suite. Choisir le chemin le plus court en évitant de rencontrer des monstres pénalise ainsi les points de vie du joueur. S’ils sont automatisés, les combats contre les blobs et autres squelettes croisés demandent en outre d’utiliser des potions de guérison et autres boosts d’attaque au bon moment pour rester en vie. Une foule d’autres subtilités tapisse ce gameplay également orienté sur la préparation de l’équipement du héros. Difficile de décrocher.

Si bien que l’hésitation domine lorsque le titre gratuit réclame un (vrai) euro contre une vie dans ses micro-transactions. Le talent méconnu de Yoshiro Kimura brillait déjà sur le mélange de gestion et de stratégie de Little King’s Story (sorti sur Wii en 2009). Et il mérite bien salaire. Dans ce cas, 7,99 euros pour décrocher la version débridée du jeu via l’achat in game d’un canard (sic!). Le gaming nippon entame peut-être son chant du cygne. Mais il est à l’image de la bande originale de Dandy Dungeon. Chantée à capella, traversée de bruitages de bouche barrés et titubant sur de la pop lancinante pour karaoké. Totalement japonais en somme.

(1) DÉVELOPPEUR DE L’OMBRE QUI A TRAVAILLÉ AVEC RYUICHI SAKAMOTO SUR L.O.L.: LACK OF LOVE, PRODUIT NO MORE HEROES AVEC GOICHI SUDA ET CRÉÉ L’EXCELLENT LITTLE KING’S STORY RÉÉDITÉ SUR PC L’AN PASSÉ.

(2) ÉQUIVALENT JAPONAIS D’UN HLM.

(3) SNACK JAPONAIS SOUS LA FORME D’UNE BOULETTE DE RIZ FOURRÉE.

ÉDITÉ ET DÉVELOPPÉ PAR ONION GAMES, ÂGE: NC, DISPONIBLE IOS ET ANDROID. ****(*)

MICHI-HIRO TAMAÏ

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