Voyage au bout de l’enfer – Vietnam

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Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Série documentaire de Ken Burns et Lynn Novick.

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Dix années de travail. Un documentaire à épisodes d’au total neuf heures pour Arte et de 18 heures pour le circuit américain. Saisissante et passionnante plongée dans l’Histoire du XXe siècle, Vietnam est une oeuvre titanesque aux allures de fresque militaire, politique et sociale. Il fallait bien ça (surtout aussi solidement traité) pour raconter le plus grand bourbier dans lequel les États-Unis se sont un jour enlisés. Une décennie d’atrocités qui a divisé l’Amérique et remis en question ses valeurs. Bilan: 58 000 morts côté Américains et trois millions de disparus, soit 10 % de la population, chez les Vietnamiens. Dans un conflit armé, il n’y a jamais de vainqueur. Il y a par contre, toujours, différents points de vue et sons de cloche. Si dans une guerre, on ne peut être un témoin neutre (« la neutralité et l’objectivité sont impossibles tellement ça vous prend par les tripes » commente l’un des nombreux intervenants), les réalisateurs Ken Burns et Lynn Novick (The War) ont veillé à aborder celle du Vietnam sous tous ses angles. Mêlant la grande et les petites histoires. L’épique et l’intime. Les décisions politiques et les tragédies humaines. On ne parle pas ici que du fiasco états-unien. Du conflit coûteux, interminable et lointain. D’un Kennedy très mal conseillé. De traductions erronées (qui débouchent sur certains épisodes dramatiques). De bombes qui tombent au mauvais endroit et d’erreurs couvertes par l’orgueil. Outre tous les témoins américains (du journaliste de terrain -200 reporters et photographes sont morts en Asie du Sud-Est- à l’activiste anti-guerre, du déserteur au soldat décoré), Burns et Novick ont interviewé des Sud- mais aussi des Nord-Vietnamiens, civils et militaires. Ils ont même eu accès aux archives nationales grâce à leur producteur asiatique et ont pu, via une agence de presse, exploiter des photos, des films et des reportages radio réalisés là-bas pendant la guerre. Destins humains de part et d’autre des deux camps. On découvre le parachutiste Denton « Mogie » Crocker. Gringalet, passionné d’Histoire et de héros américains, qui fugue en piquant la tirelire de sa soeur et ne revient qu’avec l’autorisation de s’engager signée par ses parents. Ou encore une conductrice de camion du leader communiste Ho Chi Minh… Incroyablement monté, accompagné d’une formidable bande son (à laquelle a participé Trent Reznor), Vietnam se suit comme un Apocalypse Now ou un Voyage au bout de l’enfer. Incontournable.

JULIEN BROQUET

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