Soft City

De Harinton Pushwagner, éditions Inculte. 168 pages.

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Si la bande dessinée a inspiré quelques artistes du Pop Art dans les années 60, on ne peut pas dire qu’elle fut un support privilégié dans le domaine de l’art. Malgré tout, quelques artistes s’y sont frottés. Parmi eux, le Belge Guy Peellaert et ses Jodelle et Pravda, le Japonais Keiichi Tanaami et son Killer Joe’s, plus versé dans le graphisme que dans la narration et… le Norvégien Harinton Pushwagner et son Soft City. Ce dernier, ami de William S. Burroughs, fut probablement inspiré par les écrits du célèbre écrivain lorsqu’il imagina cette histoire ubuesque d’un cadre moyen dans une mégalopole. Quand le soleil se lève sur Soft City, des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, tous semblant sortis du même moule, se lèvent tel un seul homme. Après un petit-déjeuner vite avalé, les hommes prennent la route du bureau, les enfants sont conduits à la crèche et les dames vont faire les courses. Le soir venu, tout le monde rentre à la maison dans la plus parfaite synchronisation. Véritable Metropolis sans « happy end », Soft City glace le sang par sa description de la vie morne et aliénante de la société de consommation. Dessinée dans les années 70, elle n’a pas perdu de sa force. Il faut dire que rien n’a vraiment changé depuis. Si le graphisme rebutera sans doute les amoureux de la BD franco-belge, il se dégage de la multiplication à l’infini des scènes de la vie quotidienne une impression de vertige nauséeux, particulièrement dans la scène du parking. Commencées en 1969 et achevées en 1975, les planches originales furent « perdues » entre Oslo et Londres. « Retrouvées » en 2002, les voilà enfin publiées en français. Dégoûté sans doute par cette mésaventure, Pushwagner a abandonné le médium pour se tourner vers le Pop Art et devenir le fer de lance du mouvement en Norvège.

C.B.

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