Obsédé par les yeux des voitures autonomes et autres machines intelligentes à venir, Chris Delay se met à leur place sur Scanner Sombre.

Scanner sombre

Édité et développé par Introversion Software, âge: 7+, disponible sur PC.

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Pièce maîtresse de la voiture autonome, le radar Lidar lui permet de « voir » son entourage immédiat en 3D. Cet oeil projette des millions de rayons laser qui, tels des boomerangs, lui sont instantanément renvoyés. Le tout pour mesurer la distance qui le sépare des objets environnants. Et ainsi dessiner une image 3D des véhicules et autres bâtiments qu’il croise. Fasciné par cette vision pointilliste, inhumaine et désincarnée qu’il a découverte sur le clip d’House of Cards de Radiohead, Chris Delay a décidé d’utiliser cette technique pour creuser le monde Scanner sombre. Les premières minutes orchestrées par le co-créateur indé de Prison Architect (2 millions et demi de copies vendues et un BAFTA l’année passée) se vivent comme un choc graphique. Enterré dans une grotte, sur les traces d’une secte perdue, le gamer y saisit un scanner Lidar de poing. Chaque pression exercée sur sa gâchette projette des milliers de particules multicolores sur les parois, le sol et le plafond d’une salle noir encre. Doucement, le décor se dessine. Exactement comme si l’on bombait une pièce obscure à l’aide d’un aérosol phosphorescent.

Comme sur Prison Architect, Chris Delay effeuille le thème de l’enfermement dans Scanner sombre, mais la comparaison s’arrête là. Ici, point de construction savante de pénitencier.Son jeu s’explore comme un labyrinthe dépourvu de vraies couleurs et textures. Voûtes gigantesques, stalactites, ruines de temple et autre mines transformées en musée s’y dessinent donc en nuages de millions de points. Qui arrête de bouger ne comprend plus le paysage qui l’entoure. Inconsciemment, l’esprit relie les points et complète des esquisses imparfaites. La puissance de la suggestion alimente l’imaginaire du gamer. Mais ce titre aux intentions horrifiques n’effraie pas.

Points de suspension

Hantée par une réflexion sur la mort plutôt attendue, la formidable plastique de Scanner sombre dessert ainsi son trouillomètre. Difficile de trembler face à des millions de lumières multicolores évoquant irrémédiablement les tapis de guirlandes des parades nocturnes de Disneyland. Les quelques râles démoniaques n’exploitent en outre pas tout le langage sonore propre aux survival horror. Pas très angoissant, le labyrinthe dirige sporadiquement le joueur vers de gentilles fausses pistes. Pour le défi, on repassera aussi.

Évoquant Devil’s Tuning Fork (nominé IGF en 2010), Scanner sombre manque ainsi cruellement de gameplay. Les pistes ludiques qu’il ouvre restent nombreuses. Les capacités du Lidar se boostent ainsi au fil de la progression. D’une vision à plusieurs couleurs (pour discerner les objets) à un scan instantané de tous les éléments (pratique pour ne plus devoir « colorier » les objets un à un), les nombreuses idées ludiques intéressantes du jeu restent hélas sans suite. Quelques passages jouant sur le timing et l’eau tentent également d’élever les débats, sans y arriver. Et au final, cette question potache: où est passée la lampe de poche du héros?

MICHI-HIRO TAMAÏ

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