Ma Reine

De Jean-Baptiste Andréa, Éditions L’Iconoclaste, 222 pages.

8

Premier roman déjà bien accueilli par les jurys français des prix littéraires, Ma Reine peut être décrit de la manière la plus plate possible: une éducation sentimentale sur un plateau provençal dans les années 60. Heureusement, la maîtrise narrative et la délicate fantaisie de son auteur en font bien plus que ça: l’histoire de Shell, surnommé ainsi parce qu’en raison d’un certain retard cognitif (n’est-il pas aussi « l’idiot du pont des Tuves »?) il ne va plus à l’école mais aide ses parents à la station-service, qui décide un beau jour de quitter le foyer pour aller « faire la guerre » (à quelques centaines de mètres de là), et prouver ainsi qu’il est bel et bien devenu un homme. Manque de bol, trois ans après les accords d’Evian, qui plus est au soleil du maquis, les échanges de tirs sont inexistants dans la région (« autant le dire tout de suite, parce que de toute façon tout le monde le sait: la guerre, je n’y suis jamais arrivé »), au point que le brave môme fan de Zorro et des lentilles serait mort pétrifié d’ennui si n’avait pas déboulé dans le paysage la mutine et imaginative Viviane, aux ordres de laquelle il se range illico. Arpentant avec elle -quand elle daigne se pointer- les quelques hectares de ce nouveau royaume naturel, découvrant avec le même effarement peintures rupestres et frémissements amoureux, le gamin se trouve rapidement submergé d’émotions, aux plus intenses desquelles il réagit en général entre pleurs, chiffres psalmodiés, panique et… endormissement. Andréa, lui, joue avec les codes, les poncifs parfois, pour décrire le parcours d’un jeune homme qui ne demande vraiment rien d’autre que d’exister un tout petit peu.

F.P.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content