Leçons pour un jeune fauve

DE MICHELA MURGIA, ÉDITIONS DU SEUIL, TRADUIT DE L’ITALIEN PAR NATHALIE BAUER, 272 PAGES.

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D’un côté, Eleonora, la comédienne renommée, 38 ans, sans enfants, habituée à façonner des jeunes prometteurs en devenir; face à elle, Chirù, la vingtaine, brillant étudiant en violon, paré d’une aura machiavélique engendrée par une jeunesse qui n’a rien à perdre. Un lien les unit, une même « odeur de pourriture ». Dix-sept leçons seront nécessaires pour que l’un des deux perde la face. Les jeux sont ouverts: sera-ce le jeune rebelle qui rêve de grandeur ou « la » Pygmalion avec « sa morgue inhérente à l’enseignement »? Eleonora semble hésitante; si elle a réussi auparavant à modeler deux autres étudiants, le troisième a cependant choisi la Faucheuse comme compagne. Ici encore, avec Chirù, elle ne parvient pas à maîtriser l’équilibre fragile entre ses rôles de « mère, maîtresse et professeur ». Véritable « liaison dangereuse », initiée dans le décor intimiste de la Sardaigne natale de l’auteure et dénouée lors de tournées européennes, ce roman explore en profondeur la relation maître-disciple avec l’ambiguïté de la manipulation latente, du désir et de l’arrogance. Des dialogues somptueux émaillent ces luttes où la franchise laisse sa place à une forme d’hypocrisie sociale « où haïr quelqu’un est aussi normal qu’il est inconvenant de laisser paraître sa haine ».

M-D.R.

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