La peau, l’écorce

D’ALEXANDRE CIVICO, ÉDITIONS RIVAGES, 106 PAGES.

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Dans ce deuxième roman d’Alexandre Civico, un texte bref mais remuant, les chapitres se succèdent en cadence soutenue: ils s’intitulent tour à tour « L’écorce » -pour « celui qui est parti », soldat poireautant l’arme au poing dans un désert sauvage et une guerre devenue incompréhensible- puis « La peau » -pour « celui qui est resté », un père réveillé un beau matin branché par un énigmatique cordon ombilical à sa fille, dans une ville occidentale défigurée au rythme d’explosions quotidiennes éventrant rames de métro et transformant le paysage en colonnes de fumée. Sur le théâtre des opérations, des survivants en uniforme pestilentiel scrutent en attendant la nuit un groupe de rivaux qu’ils sont bien décidés à exécuter pour récupérer leur indispensable point d’eau. À « l’arrière », le nouveau binôme organique père/fille tente de recréer une routine entre anormalité biologique, attentats permanents et ces insalubres « zones de confinement » qui regroupent tous les marginaux porteurs d’une « marque » infamante. Que faire, confronté à une situation certes imaginaire, mais qui ressemble diablement à une version plausible de ce qui se profile à l’horizon? Opter pour le camp des combattants, ayant troqué depuis un bail la morale pour la survie? Ou pour les rangs des dos-courbés, décidés à maintenir l’illusion d’une vie normale malgré les déflagrations quotidiennes? Déstabilisant, Civico dépeint cette ambiance anxiogène et ces questionnements existentiels au moyen d’une plume élégante, inventive en diable.

F.P.

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