Konbini

Au Japon, le roman a reçu le prestigieux prix Akutagawa (« notre » Goncourt), avant de devenir un phénomène éditorial. Mais on raconte que Sayaka Murata, son auteure de 38 ans, continue modestement de travailler chaque jour dans son konbini. « Konbini » (de l’anglais « convenience store »): une supérette accessible à toute heure des 365 jours de l’année, indispensable point lumineux des paysages urbains nippons. C’est là, dans le SmileMart de la gare de Hiirocho, que l’héroïne du livre, célibataire de 36 ans, semble avoir trouvé sa place. Enfant étrange aux réactions inappropriées puis adolescente mutique, Keiko Furukura se félicite d’avoir pu adopter, avec la répétition des gestes et formules du très codifié service au client japonais, les apparences d’une certaine conformité tardive. Mieux: employée idéale, elle a fini par faire corps avec le magasin (n’ingérant plus que des aliments provenant de ses rayons, son système digestif lui en apparaît comme un naturel prolongement). L’élément perturbateur arrivera sous la forme de Shiraha, un nouveau collègue récalcitrant, bientôt licencié pour avoir harcelé une cliente… Écrit dans une langue sans marques, presque sans affects, Konbini est un petit huis clos étrange et économe. À l’image d’une caméra de surveillance qui prendrait de temps à autre de minuscules libertés, il scrute, sous la surface tyrannique de l’ultranormalité, les signes de détresse, d’ironie et de poésie des existences fragiles.  » De l’autre côté de la porte, l’aquarium de verre m’attend. Un monde parfait, stable, qui continue de tourner, imperturbable. J’ai foi en ce microcosme de lumière. »

De Sayaka Murata, éditions Denoël, traduit du japonais par Mathilde Tamae-Bouhon, 128 pages.

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