Isabelle Huppert. Vivre ne nous regarde pas.

Violette Nozière, Loulou, La Porte du paradis, Madame Bovary, La Cérémonie, La Pianiste, Nue propriété, Elle: depuis sa première apparition à l’écran en 1972 ( Faustine et le bel été), Isabelle Huppert (65 ans) a imposé une silhouette, une distanciation, un timbre: un rapport incontestable, presque autoritaire, au cinéma. Dans Vivre ne nous regarde pas, la critique Murielle Joudet entreprend de faire parler les images d’une petite trentaine de ses films (signés Catherine Breillat, Hong-Sang soo ou Michael Haneke) afin d’approcher la psyché d’une actrice insondable,  » âme muette« ,  » sous scellé« . Inexplicable mélange de masochisme et de vulnérabilité, Huppert a beaucoup inspiré les pulsions sadiques des réalisateurs (ces scènes de viols, meurtres, maltraitantes et prostitution, sur-représentées dans ses rôles). Des incarnations dont elle semble sortir sans stigmates, protégée par « la blancheur » qui est l’horizon de son jeu ( » Une performance tout en surface qui laisse deviner des profondeurs inhabitées, neigeuses« ), ainsi qu’un certain règne du détachement, voire de l’ennui, au sens quasiment métaphysique:  » Elle parvient à rendre sensible un ennui qui n’est pas celui des choses qui viennent de l’extérieur, des choses ennuyeuses, mais qui devient chez elle sa tonalité fondamentale, la couleur même de son jeu. » Biographie -ou psychanalyse- cinématographique: Muriel Joudet démontre que, de rôle en rôle (leurs échos, leurs insistances), l’actrice fétiche de Chabrol contribue surtout à écrire son propre rôle. Pas tant du côté de la glaciation, ou de la tristesse, que, résolument, du côté du réel. Godard, d’ailleurs, le lui confirmera:  » Non, moi je ne pense pas que tu sois triste, ce n’est pas vrai, tu regardes les choses, ce n’est pas de la tristesse. »

De Murielle Joudet, Éditions Capricci, 232 pages.

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