Génération 80

IL Y A 20 ANS, DANNY BOYLE ADAPTAIT IRVINE WELSH, BROSSANT AVEC MORDANT LE PORTRAIT DE JUNKIES D’EDIMBOURG. SPEED, CHOC ET CULTE, LE FILM N’A PAS PRIS UNE RIDE…

Trainspotting

DE DANNY BOYLE. AVEC EWAN MCGREGOR, ROBERT CARLYLE, EWEN BREMNER. 1996. 1 H 35. DIST: UNIVERSAL.

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« Choose life. Choose a job. Choose a career. Choose a family… » Vingt ans plus tard, la scène d’ouverture de Train-spotting, course poursuite effrénée au son de Lust for Life tandis qu’une voix off débite de mornes perspectives d’existence, produit toujours le même effet, imparable. Alors que l’on attend avec curiosité mais aussi une certaine appréhension un Trainspotting 2 réunissant les Renton, Begbie, Spud, Sick Boy, Tommy et autre Diane devant la caméra de Danny Boyle, la ressortie en Blu-ray de l’original vient fort opportunément rappeler l’impact d’un film pour lequel le terme « culte » apparaît bien faible.

Le portrait grinçant d’une époque

Pour son second long métrage (après un plus que prometteur Shallow Grave), le réalisateur britannique adaptait le roman éponyme d’Irvine Welsh, brossant avec énergie, mordant et esprit le portrait d’une bande de losers patentés d’Edimbourg, héroïnomanes suintant la culture junkie par tous les pores. Soit donc Renton (Ewan McGregor, prodigieux), glandeur lucide et spirituel suivi par le film dans ses molles tentatives pour décrocher, guère aidé il est vrai par des camarades passant le plus clair de leur temps à se shooter (ou à commettre de menus larcins pour se procurer de la dope), à l’exception notable de Begbie (Robert Carlyle), plus porté sur l’alcool et la baston, et Tommy (Kevin McKidd), le sex addict de l’équipe… Débutant de manière tonitruante, Trainspotting adopte ensuite un cap résolument acide, tandis que ses protagonistes jouent au yoyo entre moments exaltants et descentes abyssales assorties de plans sordides. L’expérience est décoiffante qui, à l’abri de l’apologie mais aussi de toute posture moralisatrice, envisage le monde à travers leur regard -entre commentaires acerbes et visions bien barrées, du bébé rampant au plafond à la plongée dans le WC le plus crade d’Ecosse. Et l’on en passe, le tout assaisonné d’un humour omniprésent -des vannes sur Sean Connery et Bond à un entretien d’embauche surréaliste, dans le ton d’un film se gardant de tout naturalisme-, et dopé par une bande-son d’exception, courant de Iggy à Blur et Pulp en passant par Leftfield et Underworld, manière aussi de dater l’histoire, des 80’s aux 90’s.

Soit un classique instantané, portrait grinçant d’une époque aussitôt labellisé film générationnel. Lequel, 20 ans plus tard, n’a donc pas pris une ride -on a beau en connaître chaque plan, la vision de Trainspotting se révèle invariablement euphorisante. Abondants et intéressants, les bonus compilent des interviews réalisées en 1995 sur le tournage, et en 2003, ainsi que lors d’une party restée dans les mémoires cannoises -l’occasion pour Damon Albarn d’observer: « Voilà un film britannique qui nous change de Hugh Grant sur la colline…« Indeed.

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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