Coeurope

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Documentaire de Giovanni Troilo.

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L’histoire avait fait grand bruit. En mars 2015, le concours de photojournalisme World Press Photo retirait à l’Italien Giovanni Troilo son prix pour une série (La Ville noire) montrant les habitants de Charleroi sous un jour particulièrement misérabiliste et glauque. Si Paul Magnette avait argué d’une déformation de la réalité portant préjudice à la ville et à ses habitants ainsi qu’à la profession de photojournaliste, le jury avait accepté la mise en scène évidente. Moins le fait que l’un des clichés avait été tiré à Molenbeek… Bâti dans pareil moule, le documentaire du même Giovanni Troilo sur l’ancien fleuron industriel hennuyer ne servira évidemment pas de clip promotionnel pour la ville. « À Charleroi, tous ceux qui disent qu’ils ne sont pas armés sont des menteurs. On est tous armés à Charleroi. Et tu y achètes tout ce que tu veux. Armes blanches, grenades… » « C’était une ville riche avant mais maintenant, c’est n’importe quoi. C’est le déluge. Et le soir, vaut mieux pas sortir. » Le visage ensanglanté d’un gamin qui s’est mis volontairement la tête dans une vitre, les confessions d’une dominatrice sadomasochiste, les récits d’un père et de son fils qui vident des maisons. Et puis la pluie, encore la pluie. Coeurope montre la ville dans toute sa grisaille et la vie dans toute sa misère. Le film a beau épingler quelques moments de joie, évoquer le caractère chaleureux des habitants, les longs travellings léchés, les images d’archives et les successions de photos lui servent un désespérant reflet. Esthétiquement réussi mais déontologiquement questionnant…

J.B.

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