Cartel de Kali

© DR

Malgré la pléthore d’invités prestigieux, Kali Uchis reste bien la seule pilote d’un premier album qui multiplie brillamment les évidences pop.

La machine musicale est un monstre jamais rassasié. Avide de nouveautés, il lui faut en permanence de nouvelles têtes. Cela a toujours été le cas? Certes. Mais peut-être jamais autant depuis que le Net a multiplié les robinets de diffusion. L’industrie a pris le pli de tirer à tout va, en espérant toucher la cible au moins une fois. Résultat: plus besoin d’attendre, il suffit d’un titre qui a cartonné sur SoundCloud, d’un nombre de followers qui s’affole sur Instagram pour lancer les grandes manoeuvres. Cela peut être harassant. Le danger pour un artiste étant d’arriver déjà complètement essoré au moment de sortir seulement son premier album. Cela aurait pu être le cas, par exemple, de Kali Uchis. Depuis sa première mixtape autoproduite, en 2012, alors qu’elle était encore au collège, on a pu l’apercevoir aux côtés de Snoop Dogg, Tyler, The Creator ou encore sur le dernier album de Gorillaz, tout en glissant un EP ( Por Vida), en 2015. C’est dire que l’effet de surprise a disparu. Et pourtant, Isolation, premier effort longue durée de l’intéressée , réussit à capter l’attention. Mieux: à la retenir, en pondant l’une des sucreries pop les plus addictives du moment.

French like Brigitte Bardot

Née Karly-Marina Loaiza, en 1993, Kali Uchis a grandi entre sa Colombie natale et les États-Unis. De ces aller-retours, elle garde des traces évidentes sur des morceaux comme Nuestro Planeta, et ses airs reggaeton. Il ne faudrait cependant pas faire de la jeune femme une sorte de version latina des nymphettes pop modernes. En intro, elle se pavane sur Body Language, séquence exotica produite par Thundercat où elle rappelle une chanteuse comme Nicolette. Son goût pour les références vintage l’a aussi souvent rapprochée d’une Amy Winehouse -c’est le cas sur la rétro soul de Flight 22 ou le classic r’n’b de Feel Like a Fool (cuivres compris). En fin de disque, Killer est également une ballade d’amour déçu, qui peut éventuellement suggérer l’association. Le morceau constitue toutefois une exception. À la figure de la femme prise au piège de ses addictions (amoureuses et autres), Kali Uchis préfère endosser celle de l’héroïne pop boostée à l’affirmation de soi – » If you need a hero, just look in the mirror« , chante-t-elle dans After the Storm– et au girl power ( » All we ever do is French like Brigitte Bardot » , sur Tyrant, référence à l’actrice française quand elle représentait la libération sexuelle de la femme).

Cartel de Kali

À cet égard, la liste d’invités a beau être pléthorique -de Damon Albarn (la pop Casio de In My Dreams) à Jorja Smith ( Tyrant), en passant par Tyler, The Creator, Boosty Collins et les jazzeux canadiens de BadBadNotGood (tous présents sur la soul seventies d’ After the Storm) ou encore Steve Lacy sur le funky Just a Stranger-, c’est bien Kali Uchis qui reste aux commandes. Avec, au final, un album entre pop et nu soul, copieux certes (quinze titres tout de même), mais concentré en 45 minutes, et quasiment sans temps faible. Que demande le peuple?

Kali Uchis

« Isolation »

Distribué par Universal. En concert le 05/07 à Rock Werchter.

8

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content