Carte blanche à mohamed ouachen

Je m’appelle Mohamed Ouachen, je suis un artiste bruxellois. J’ai fondé il y a une dizaine d’années une plateforme qui s’appelle Diversité sur Scènes et qui a comme objectif de faire la promotion des artistes à l’image de la diversité bruxelloise. À travers cette dynamique, j’ai constaté qu’il était très difficile de sensibiliser les institutions culturelles et les médias à la question de la diversité, et plus particulièrement à cette nouvelle émergence culturelle issue de quartiers populaires.

Il nous a semblé alors important, au lieu de continuer à essayer de prendre place dans les lieux existants, d’en créer.

Le Brass’Art digitaal Café est un espace culturel associatif, citoyen et artistique. Il a comme objectif d’offrir un espace connecté à l’espace public. L’idée est de réfléchir à une nouvelle manière de se rencontrer. Les artistes et l’associatif choisissent eux-mêmes leur programmation.

Le 22 mars est devenu une date symbolique. Nous l’avons choisie comme date d’ouverture officielle. Ce lieu est une solution contre le repli identitaire en luttant contre toutes les formes de préjugés et pour cela il est impératif que les gens se parlent. Des lieux qui brassent les cultures sont la meilleure manière de lutter contre le repli.

Je ne crois pas au concept du vivre ensemble, c’est tellement abstrait. Jusqu’à preuve du contraire, nous vivons ensemble à Bruxelles. Ce qui nous manque, c’est le réfléchir ensemble. Réfléchir la ville, la culture, l’économie, l’urbanisme… C’est avec toutes les composantes de notre société que l’on peut avancer et être ensemble sur le long terme. Il y a une culture dominante qui représente une petite partie des Bruxellois; il faut qu’elle s’ouvre et qu’elle arrête d’ignorer cette partie signifiante de la population bruxelloise. C’est pour cela qu’aujourd’hui on peut constater que la culture ne s’adresse pas à tous.

Il faut que les médias et les directeurs de théâtre se lancent ce défi d’intégrer dans leur espace toute la diversité qui existe dans nos villes. Ça doit être surtout riche de représentativité. Ce n’est que comme ça que cette minorité pourra se sentir représentée et se sentir chez elle en s’émancipant et en puisant toutes les richesses qui composent notre capitale.

Et de l’autre coté, il faut que les politiques aient plus de courage. Il en manque beaucoup en Belgique. On les voit sortir juste à la veille des élections et parler plus quand ils sont dans l’opposition. Il vaut mieux avoir une politique à l’image des citoyens que des citoyens à l’image du politique. C’est pour cela que je crois encore en l’humain et en sa capacité d’initier des choses. Toucher les coeurs me semble le défi de demain car pour les mentalités, ça prendra plus de temps, je le crains.

Cinéaste et entrepreneur culturel né en 1974 à Charleroi, Mohamed Ouachen a commencé le théâtre un peu par hasard, au sein du collectif Dito’Dito. Il a notamment porté le seul en scène Rue du Croissant, écrit par Philippe Blasband, qui raconte Bruxelles dans toute sa diversité.

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