Brandebourg

de Julie Zeh, Éditions Actes Sud, traduit de l’allemand par Rose Labourie, 528 pages.

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Brandebourg, région allemande anciennement à l’Est qui entoure Berlin sans profiter de sa richesse. Le village de Unterleuten gît au milieu d’une terre sablonneuse bordée de forêts, de champs et de prairies, où viennent s’accoupler les combattants variés, espèce d’oiseau rare et protégée. Un lieu qu’a choisi Gerhard Fliess, ancien prof d’unif cinquantenaire qui a fui la ville avec sa famille. Tout comme Linda et Frédérik, qui ont eux aussi quitté Berlin. La jeune femme a un projet d’élevage de chevaux et entend convaincre un riche rentier de lui céder une partie des terres qu’il possède à Unterleuten, afin de les transformer en pâture pour équidés. Tous ces « Occidentaux » se comportent consciemment ou inconsciemment en terrain conquis dans ce petit village qui suinte l’ennui et les vieilles rancoeurs. La figure tutélaire en est Gombrowski, sorte de chien Saint-Hubert fait homme aux épaules et bajoues lourdes. Dans une sorte de jeu permanent d’alliances et mésalliances, le prochain projet d’éolienne va faire souffler un vent mauvais sur le village et les esprits… Vertigineux roman choral, Brandebourg livre une remarquable galerie de portraits, pénétrant les pensées de chacun des protagonistes à tour de rôle, chacun d’eux ruminant des secrets enfouis, et possédant sa propre vérité loin de la réputation et des ragots que le village peut colporter. Auteure, avec Atteinte à la liberté en 2010, d’un livre sur l’obsession sécuritaire (dont Brandebourg serait à nouveau la critique en creux), Julie Zeh utilise sa langue déliée pour construire un thriller au coeur d’un village de damnés qui a des allures d’ancien… Far-Est.

B.R.

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