Benjamin Clementine

« I Tell A Fly »

Distribué par Universal.

8

En 2015, Benjamin Clementine remportait le prestigieux Mercury Prize pour son premier album, At Least For Now. Une récompense méritée mais surprenante, tant la pop baroque du jeune Anglais peut détoner dans le climat musical actuel. Âme solitaire et sauvage, davantage porté à idolâtrer Piaf que Miley Cyrus, Clementine était a priori plutôt destiné à rester coincé dans la marge. S’il n’est pas pour autant devenu une star planétaire, qu’allait-il faire de ce coup de projecteur soudain? D’abord une apparition sur le dernier album de Gorillaz: timbre de voix abyssal, accents de pasteur hanté, il menait les débats du très politique Hallelujah Money. Quelques mois plus tard, force est de constater que son nouvel album ne l’est pas moins.

Clementine explique la genèse d’I Tell A Fly par une anecdote: la découverte de la mention « an alien of extraordinary abilities », accompagnant son visa américain. Une définition qu’il reprend aujourd’hui mot pour mot dans son morceau Jupiter. En général, il sert de slogan pour un disque creusant la question de l’outsider, de l’étranger (By The Ports of Europe, ou God Save The Jungle, qui renvoie bien à celle de Calais), du marginal qu’on harcèle et pousse sur le côté (Phantom of Aleppoville). Pour appuyer son discours, il aurait pu reprendre la pose du songwriter maudit et habité. S’il ne l’abandonne pas tout à fait (Quintessence), il multiplie surtout les expérimentations et ose le sarcasme. À la lisière de l’avant-garde, osant l’emphase prog (plus très loin d’un Peter Hamill), il tord ses chansons, leur fait prendre 1 000 détours. Culotté, hors format, mais définitivement brillant.

En concert le 08/11, à l’Ancienne Belgique, Bruxelles.

L.H.

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