Critique | Livres

Le livre de la semaine: La Facture, de Jonas Karlsson

Jonas Karlsson © DR
Eric Swennen
Eric Swennen Journaliste livres

ROMAN | A cheval entre fable contemporaine fantasmant une redistribution équitable du bonheur et gentille satire aux relents kafkaïens, La Facture évoque finalement plus The Truman Show ou même Amélie Poulain que 1984.

Le livre de la semaine: La Facture, de Jonas Karlsson
© Actes Sud

Si l’argent ne fait pas le bonheur, ce dernier pourrait bien vous coûter cher. C’est ce qu’apprend avec incrédulité et stupeur le paisible employé d’un DVD club d’art et essai suédois -la planque parfaite quand on aspire comme lui à une existence de célibataire sans attache, profitant juste d’un mode de vie nordique, connu pour être particulièrement épanouissant. Mais c’est précisément cette faculté à vivre sainement les hauts et les bas de cette existence qui va lui valoir une… « facture sur le Bonheur Vécu » de plus d’un demi-million d’euros. Une somme vivement contestée par notre homme, qui juge que sa vie, un interminable cocktail d’instants ternes menés par une absence d’ambition, ne peut en aucun cas coïncider avec un tel résultat. Renseignements pris auprès de sa conseillère assermentée Maud, il apprendra que le bonheur n’est pas la simple somme d’événements positifs tapageurs mais bien la capacité de gérer et surtout de digérer leur cruelle absence. Domaine dans lequel il excelle incontestablement par rapport à une population stressée, subissant une pression sociale franchement néfaste au développement personnel. Et noircir le tableau pour tenter d’alléger la note ne fera qu’empirer les choses: l’Etat a peut-être affaire à l’homme le plus heureux du pays, mais il n’a malheureusement pas les moyens d’en assumer les conséquences… A cheval entre fable contemporaine fantasmant une redistribution équitable du bonheur et gentille satire aux relents kafkaïens, La Facture évoque finalement plus The Truman Show ou même Amélie Poulain que 1984. A défaut d’être incisif, laissons toutefois à Jonas Karlsson -célèbre acteur suédois converti à l’écriture- une certaine aptitude à la concision dans ce qui s’avère être une lecture d’été un peu plus regardante que la moyenne.

ROMAN. DE JONAS KARLSSON, ÉDITIONS ACTES SUD, TRADUIT DU SUÉDOIS PAR REMI CASSAIGNE, 192 PAGES.

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