Critique | Livres

La main d’Iman

Marie-Danielle Racourt
Marie-Danielle Racourt Journaliste livres

ROMAN | Dès la première page, le ton est donné: un père béninois vend son fils de 10 ans pour 23 euros. L’histoire débute au Bénin en 1965 et relate la vie de populations soumises au gré des coups d’Etat, la plupart militaires et dictatoriaux.

DE RYAD ASSANI-RAZAKI, ÉDITIONS LIANA LEVI, 327 PAGES. ****

ROMAN | Dès la première page, le ton est donné: un père béninois vend son fils de 10 ans pour 23 euros. L’histoire débute au Bénin en 1965 et relate la vie de populations soumises au gré des coups d’Etat, la plupart militaires et dictatoriaux. Après une domination infligée par une colonisation à la dérive, c’est à présent au tour des chefs africains de semer la terreur. Dans ces luttes fratricides survivent quelques personnages hors normes: Zainab, qui a compris très jeune que seule l’indifférence la sauverait, ou encore Hadja, qui se réfugie dans l’Islam pour mettre une distance entre sa propre personne et les vautours qui la convoitent. Et puis, entrent en scène nos trois « héros »: Alissa, Toumani et Iman. Alissa s’incline devant les choix de ses parents, elle se soumettra à son futur époux désigné et, par anticipation, à ses enfants. Toumani, le fils vendu, est celui pour qui Alissa quitte la voie tracée par le destin. Réduite à un instrument qui ne sert qu’à « façonner », elle réalise trop tard que ce sacrilège est dangereux, voire fatal dans un pays où « une femme n’a aucune valeur si elle n’a pas un homme ». Quant à Iman, il est « une coquille vide » qu’il cherche à remplir par les autres. Renié par son père européen, puis par sa mère, il doit se reconstruire alors qu’au Bénin, « penser à demain est penser à long terme, et le long terme, c’est un luxe ». Ce roman extrêmement sombre et bouleversant, mené par six voix narratives, est un cri déchirant de détresse qui remue les tripes.

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