Critique | Livres

La BD de la semaine: La Mort Blanche de Robbie Morrison et Charlie Adlard

La Mort blanche © DR
Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

Les albums consacrés aux deux guerres mondiales se multiplient. Une hémorragie de circonstance qui recèle quelques perles, dont La Mort Blanche.

Pas de surprises: les éditeurs de bande dessinée, déjà habituellement friands de récits de guerre, se sont rués dans la brèche mieux qu’un escadron américain. Les commémorations se bousculant en effet en cette année 2014 où se croisent le centenaire de la Première Guerre mondiale et les 70 ans du débarquement de la Seconde, la bousculade se fait aussi dans les rayons BD, où il n’y en a plus que pour elles. Et pour tous les goûts, vu la pléthore de sorties guerrières. Du franco-belge divertissant et typique? On a vu passer D’encre et de sang de Renaud et Gihef chez Sandawé, Les Chasseurs d’héritiers chez Delcourt et même une nouvelle série, Lignes de front, sur la Seconde Guerre mondiale. Plus didactique? On conseillerait alors Le Combat des Justes, sur les sauveurs d’enfants juifs, La Nueve, consacré aux Républicains espagnols qui libérèrent Paris, Les Anges de Mons publiés à l’occasion de Mons 2015, ou encore le formidable livre-concept paru chez Aire Libre, en collaboration avec l’agence Magnum: Omaha Beach, mêlant bande dessinée et photographie, en l’occurrence le célèbre cliché de Robert Capa, seul photographe présent lors du débarquement. Mais s’il ne devait en rester qu’un, consacré lui à la « Der des Ders » qui ne le fut pas, la médaille du pur plaisir bédéphile reviendrait sans doute à La Mort Blanche. Un étonnant comics anglais ressorti des limbes, là aussi pour l’occasion.

Walking dead

Scénarisé par Robbie Morrison et surtout mis en scène par Charlie Adlard, dessinateur des fameux Walking Dead, La Mort Blanche revient sur un épisode peu traité en BD (en soi, déjà un exploit) de la Première Guerre mondiale, à savoir le front italien et montagneux de Trentino, en 1916, lorsque les soldats craignaient les avalanches plus que les balles. Des avalanches provoquées à coups de canon pour ensevelir l’ennemi, et des soldats italiens enrôlés de force, passant parfois d’un côté à l’autre, en fonction des victoires et des avancées italiennes ou austro-hongroises. Réalisée en 1998, avant l’énorme succès surprise de sa série zombiesque, cette Mort Blanche depuis longtemps disparue ressort des limbes entièrement remasterisée, mettant en avant les étonnantes expériences graphiques qui y étaient menées: un mélange de fusain et de craie sur papier gris, qui se révèle idéal pour exprimer la force de cet enfer blanc et l’expression des visages, pour la plupart terrorisés. Un titre, un style et des origines britanniques qui font figure d’exception dans le débarquement des nouveautés calibrées, et sans doute très vite remplacées par d’autres -il y a toujours des pertes importantes, sur ce front-là aussi.

La Mort Blanche de Robbie Morrison et Charlie Adlard, éditions Delcourt, 98 pages.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content