Critique | Livres

[La BD de la semaine] Imbattable (tome 1), de Pascal Jousselin

© Dupuis
Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

HUMOUR | Imbattable maîtrise les espaces intericoniques, les perspectives, l’espace et le temps! Et en plus, il est drôle!

Il fallait y penser. Imbattable, c’est son nom, fait a priori pâle figure face aux « vrais » super-héros: certes, il a comme eux une identité secrète, un masque, une cape, un étrange logo sur le poitrail et même un ennemi juré, mais le tout cache mal son allure d’homme banal – on le croise souvent à la boulangerie, en train de faire le ménage ou de ramener ses courses. Pourtant, qu’on ne s’y fie pas: son créateur lui a donné les plus grands super-pouvoirs de tout le Neuvième Art! Imbattable est en effet incapable de lire dans les pensées, de lancer des boules de feu ou de devenir tout vert, par contre, il est bien le seul à pouvoir se transporter, dans une planche, d’une case à l’autre, de mettre un coup de balai de la case 3 à la case 7, de sauter de la case 8 à la case 12, et ainsi maîtriser l’espace et le temps! L’arme absolue dans un univers en deux dimensions où « le temps est l’espace et l’espace est le temps », où notre héros va affronter le pire, de « Pépé cochonnet » capable de matérialiser ses phylactères quand il est en colère à « Two-D Boy », « le Boy X-Y qui se rit du Z » (c’est des maths), capable, lui, de se jouer des perspectives. L’arbre, tout petit en fond de case? Il l’attrape avec deux doigts! C’est dire si Imbattable va devoir se jouer des codes de l’art séquentiel narratif et de ses espaces intericoniques pour sauver le monde, ou son quartier pour commencer. Surtout, il va faire rire tout le monde, des plus petits aux plus grands, et ça, c’est aussi un vrai super-pouvoir.

Comme Julius, en plus drôle

[La BD de la semaine] Imbattable (tome 1), de Pascal Jousselin

Pascal Jousselin n’a évidemment pas inventé le principe, en BD, du contenant qui devient contenu: Winsor McCay jouait déjà en 1905 avec les cases de Little Nemo. Serge Gennaux a inventé L’Homme aux phylactères dans les années 1970, et Marc-Antoine Mathieu semblait avoir définitivement fait le tour de la question avec Julius Corentin Acquefacques dès 1990, et ses six albums mémorables, mais intellos, autour d’un personnage vivant réellement, physiquement, dans un univers de bande dessinée. On trouve d’ailleurs dans Imbattable comme chez Julius une planche trouée mettant le brin dans la narration d’une histoire complète. L’idée n’est pas neuve donc, mais formidablement remise au goût du jour, et surtout appréciable par tous avec un minimum de concentration – les gosses adorent! Mieux: Pascal Jousselin ne se contente pas de sa bonne idée et des jolis casse-tête qu’elle provoque dans ses planches; l’auteur saupoudre l’ensemble avec un humour et d’autres bonnes idées tout aussi remarquables. Le fait que Two-D Boy soit en pleine mue est par exemple au moins aussi drôle que son super-pouvoir. Bref, Imbattable est bien né, et porte bien son nom.

DE PASCAL JOUSSELIN, ÉDITIONS DUPUIS, 48 PAGES. ****

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