Critique | Livres

Cellule Poison: Comptines (tome 5)

Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

POLAR | L’atypique Laurent Astier clôt sa série sur les réseaux de prostitution de la mafia albanaise. Un polar noir mais tout en bichromie(s).

DE LAURENT ASTIER, ÉDITIONS DARGAUD, 98 PAGES. ***

En 2006, le Français Laurent Astier entamait cette série policière étonnante à plus d’un titre, et on ne peut plus polar: une plongée de l’intérieur, via des flics infiltrés, dans les méandres des réseaux de prostitution et des nouvelles mafias de l’Europe de l’Est, albanaise en particulier. Six ans plus tard, le même clôt définitivement sa série, toujours très documentée, avec ce cinquième tome fidèle aux précédents, bouclant entre la France, la Macédoine et l’Albanie, toutes les intrigues entamées dès le premier opus: le sort de la flic Claire Guillot, de son partenaire Zoran, des mafieux Zani ou Nusret, mais aussi leur jeunesse et bien d’autres clés de compréhension, distillées depuis le départ dans de nombreux allers et retours temporels. Etonnant donc: outre sa structure narrative ambitieuse et son sujet particulièrement sombre et fouillé, Cellule Poison fut aussi le lieu de bien des expérimentations graphiques de son auteur, nourri autant de BD franco-belges que de mangas ou de séries US.

La série fut ainsi préalablement pensée comme un manga noir et blanc de près de 900 pages! Laurent Astier en a tout de même gardé 500, tout en privilégiant un trait rapide se passant de crayonnés et surtout une mise en couleurs basée sur une succession de bichromies purement impressionnistes. Tonalité jaune, verte, rose, bleue… Des choix osés, proches du travail d’un cinéaste comme Soderbergh dans Traffic, mais à chaque fois mis au service de son histoire. Une histoire parfois proche du BD-reportage ou de l’enquête de terrain, et d’évidence nourrie dans ce dernier chapitre par L’affaire des affaires, un autre des grands travaux de Laurent Astier, réalisé avec Denis Robert autour de l’affaire Clearstream: les ramifications du crime mènent toujours aux politiques… Seul écueil de cet ultime épisode: il faut vraiment avoir lu les précédents pour y comprendre quelque chose! Une nécessité que n’ont visiblement pas compris tous les lecteurs: « Merci à ceux qui n’ont pas lâché, merde aux autres! », écrit ainsi l’auteur en préface de cette ultime Comptines.

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