Laurent Raphaël

Édito: Vade retro 2015

Laurent Raphaël Rédacteur en chef Focus

Au hit-parade des années de plomb, 2015 figurera certainement en bonne place, peut-être même sur le podium.

On a beau avoir doublé récemment la dose de Tranxène et mis une cuillère de Frédéric Lenoir (l’auteur de La Puissance de la joie) dans notre café ce matin, quand on repense aux douze derniers mois, impossible de ne pas voir le verre aux trois quarts vide. Et à travers ses parois graisseuses un cortège funèbre de mots échappés d’un mauvais thriller apocalyptique: attentats, terreur, psychose, chasse à l’homme… Vite qu’on en finisse avec ce millésime rabat-joie dont le scénario a dû être écrit un jour où le Seigneur avait une crise de foi! Conséquence: il s’est particulièrement acharné sur le monde culturel occidental, qui a payé un lourd tribut à la connerie et à la haine universelles. Humain d’abord avec Charlie Hebdo et le Bataclan, moral ensuite avec ces profanations à répétition (Paul McCarthy, Anish Kapoor…) et enfin économique avec la double peine de la sanction financière qui s’ajoute au choc du carnage, le public se faisant prier pour reprendre le chemin des salles.

Il faut se rendre u0026#xE0; l’u0026#xE9;vidence: notre modu0026#xE8;le capitaliste est dans l’impasse. Il produit plus de du0026#xE9;chets que ce que les classes moyennes peuvent absorber.

Même si ce n’est qu’une illusion d’optique, le Nouvel An est d’ordinaire l’occasion de remettre symboliquement les compteurs à zéro, de reprendre son sort en main. Un peu comme au tennis: même si on a perdu une manche, on peut espérer se rattraper dans la suivante. Sauf qu’avec trois cordes cassées, un genou en compote, une épaule déboîtée et des lacets emmêlés, c’est loin d’être gagné. Car il faut se rendre à l’évidence: notre modèle capitaliste est dans l’impasse. Il produit plus de déchets que ce que les couches intermédiaires de la société -en gros les classes moyennes- peuvent absorber. On le savait -les signaux d’alerte comme le mouvement Occupy, la crise de 2008 n’ont pas manqué-, mais maintenant que ça pète en bas de chez nous, on ne peut plus détourner les yeux. Il ne suffira plus cette fois-ci de remettre une pièce dans la machine pour la relancer. Il va falloir réinventer un monde meilleur, moins cupide, moins utilitariste, moins faux-cul. Et pour ça une seule solution: miser sur l’éducation et la culture, les meilleures armes contre tous les Trump et les Abaaoud du monde. Messieurs les capitalistes, c’est maintenant ou jamais!

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