Francofolies de Spa 2011: Brigitte, francofolles

« Maintenant battez-vous », réclamait le duo parisien Brigitte. Pour les revoir sur scène, il se pourrait qu’on s’y plie. Dernier jour de Francos dans un Village francofou où les surprises n’ont pas manqué.

Sur le podium découverte Graine de Star balayé par le graillon, les effluves de pains-saucisses et le tchic-boum du troquet d’à côté, un type s’égosille « Walloniiie, terre d’accueil », en singeant la technique vocale de Dolores O’Riordan des Cranberries.

Terre d’accueil en effet pour une flopée de Québécois, ce dimanche aux Francos. Les Cowboys Fringants rameutent leurs fanatiques déchaînés devant la scène Proximus, vers 18h45. Un public à qui Karl Tremblay pourrait chanter le bottin que ça le plongerait dans la même extase, celle qui pousse à faire l’acquisition d’un drapeau fleurdelisé du Québec et à le secouer frénétiquement durant plus d’une heure. Musicalement, les Cowboys oscillent entre chansons à boire, boeufs de feux de camp scouts et ritournelles de marins sexuellement minés à la Hugues Aufray. Textuellement, ils font dans la nostalgie d’un « bon temps qui passe finalement comme une étoile filante », l’exaltation d’un Québec libre et des considérations vaguement sociales. Visuellement, ces folkeux country sont les cousins germains des Gauff’, avec leurs casques de moto, pantalons fluo et autres cagoules de cambrioleurs… La recette parfaite pour faire scander à l’assistance le fameux Popolopopopopooo piqué aux White Stripes en fin de show. Un carton plein de son côté, très peu du nôtre.

Il faut dire que les Québécois qu’on attend, nous, ce sont les Misteur Valaire, dépêchés pour clôturer le festival devant une foule clairsemée (les Montréalais ne sont clairement pas une tête d’affiche): un composite explosif fait hip hop, de jazz, de funk, de beats électroniques et de cuivres organiques. De la musique de la Belle Province garantie sans trémolos dans la voix, clichés de grands espaces et références au passé qui ne reviendra plus. Un groove face auquel les français de General Elektriks passent pour des vieillards neurasthéniques.

Misteur Valaire, déjà passé à Dour et à la Maison du peuple, propose un set infernal, furieusement dansant, qui donnera le coup de grâce aux dernières paires de guibolles encore en vie dans le Parc de Sept Heures avec Ave Mucho, un titre hip hop enregistré avec le collectif Bran Van 3000 et « performé » ici sans l’aide de personne dans un déluge de décibels et une énergie punk. Une claque, entendra-t-on autour de nous… Mais nous, on le savait qu’ils gagnaient à être connus, les natifs de Sherbrooke (comme Garou, hu hu).

La baffe, la vraie, elle viendra donc plutôt du duo féminin Brigitte. Un projet qui n’aurait pu être qu’un gadget boboïsant (cfr leur cover de Ma Benz de NTM), mais qui sur scène révèle une envergure insoupçonnée. Malgré les basses d’un Martin Solveig cantonné à mettre des disques dans la platine et à beugler dessus, polluant les derniers rangs du dôme BNP Paribas. Toutes droit sorties de La Party de Blake Edwards, les Parisiennes (sosie de Cheryl Ladd à gauche, de Thora Birch dans Ghost World à droite) assument leurs références seventies tout en les dynamitant avec des textes ultra contemporains à la violence larvée dans chaque couplet. Ainsi de J’veux un enfant, « Mais sur mes dessous, le sang revient, comme toujours ». Un peu trash parfois, vulgaire jamais. Quand elles disent « Fils de pute », les Brigitte, c’est délicieux, élégant, léger comme une bulle de savon. Avec l’imparable Battez-vous, ces girls with attitude finissent de conquérir une assistance amoureuse qui leur passe tout, surtout quand c’est exécuté avec autant de panache. Les filles à paillettes se permettent des rythmes africains lorgnant vers Magic System et une reprise de Eye of the Tiger: le spectateur devient un loup de tex Avery, la langue aux genoux, les yeux exorbités. « Brigitte nique ta mère », lancent-elles. Classe. Et là, pas de Popolopopopopooo pour les honorer.

Myriam Leroy

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