Critique

Rango

ANIMATION | Autour d’un lézard héros malgré lui, Gore Verbinski signe un savoureux film d’animation, hommage au western, avec un goût prononcé pour le spaghetti.

Un film où, à la question « C’est le paradis? », le héros s’entend répondre « Si c’était le cas, on mangerait des pâtisseries avec Kim Novak », ne peut être qu’un bon film. Et de fait, première incursion dans l’univers de l’animation de Gore Pirate des Caraïbes Verbinski, Rango cultive le sens du trait bien placé, à quoi s’ajoute celui de la référence, le tout au service d’un scénario joyeusement échevelé. Tout commence sur un air de mariachis, lorsqu’un accident de la circulation projette un caméléon d’aquarium (la voix de Johnny Depp, et un look vaguement réminiscent de E.T.) dans l’horizon inhospitalier du désert de Mojave. Direction Dirt, petite ville sortie tout droit de la mythologie du western, sa rue unique balayée par les vents, et son saloon, fréquenté par une faune patibulaire, où notre lézard reçoit un accueil digne du pied-tendre qu’il est -le genre à commander de l’eau dans un endroit où l’on ne jure que par le jus de cactus.

Qu’à cela ne tienne: promptement rebaptisé Rango, l’étranger se mue en héros de l’Ouest autoproclamé. Un visiteur d’autant plus bienvenu que la bourgade du désert est menacée par une pénurie d’eau qui se révèlera moins inexplicable qu’il n’y paraît. A charge toutefois pour Rango, aussitôt promu shérif mais ne présentant que de fort relatives dispositions pour ses nouvelles fonctions, d’y mettre bon ordre, et d’affronter des individus sournois et autre tueur plus vrai que nature ayant placé Dirt sous l’emprise de la terreur…

Sous le ciel de l’Ouest

Sur un canevas empruntant à L’homme des vallées perdues et quantité de déclinaisons de la figure du justicier solitaire, Gore Verbinski signe un film d’animation particulièrement savoureux. Soit la version animalière et parodique d’un parcours initiatique somme toute classique, mais rendu goûteux par la personnalité même de son héros, caméléon plus habitué à se fondre dans le paysage qu’à jouer les fier-à-bras, décalage propice à des aventures d’autant plus insolites que peuplées d’une galerie de personnages inédits -les tatou, lézarde, renarde, tortue, hiboux, chiens de prairie, monstre de Gila, serpent à sonnettes, et on en passe…

L’un des attraits du film tient assurément à la qualité de son animation, qui réussit à rendre cet environnement, pourtant improbable, on ne peut plus réaliste. Le fruit de la maîtrise de ILM, la société d’effets spéciaux de George Lucas. Celui aussi, du recours, pour l’enregistrement des voix, à la technique dite de l’  » Emotion Capture « , voisine de celle qu’avait utilisée Wes Anderson pour Fantastic Mr Fox. Les comédiens interprétant les voix de Rango ont réellement joué leurs scènes, vêtus comme des cow-boys évoluant dans des décors de westerns qui plus est, afin de permettre aux animateurs de capter une gamme complète d’émotions, pour un résultat proprement soufflant.

La suite est notamment question de références qui, de Fear and Loathing in Las Vegas à L’homme sans nom, emprunté à Sergio Leone, pullulent, sans pour autant écraser le film. Un brin décousu dans un premier temps, Rango trouve bientôt sa voie, sous le ciel d’un Ouest empruntant autant à John Ford qu’au western spaghetti. Nul n’échappe à sa propre histoire, en effet…

Rango, film d’animation de Gore Verbinski. Avec les voix de Johnny Depp, Isla Fisher, Ned Beatty. 1h40. Sortie: 02/03. ***

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Jean-François Pluijgers

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