Critique

Norwegian Wood

DRAME | Dix ans après A la verticale de l’été, Tran Anh Hung est de retour avec Norwegian Wood, adaptation inspirée de la Ballade de l’impossible, best-seller du romancier japonais Haruki Murakami.

Adapté du roman La Ballade de l’impossible d’Haruki Murakami, et empruntant son titre à la chanson des Beatles qui éveille les souvenirs du narrateur, Watanabe, Norwegian Wood nous emmène au Japon, en 1967, à la rencontre de trois jeunes gens, tout à l’insouciance de leurs vingt ans pas même consommés. Outre Watanabe, il y a là Naoko, jolie fille dont il est secrètement amoureux, et Kizuki, le petit ami de cette dernière; un trio qui évoquerait furieusement celui à l’oeuvre dans Jules et Jim, si Kizuki ne choisissait, inexplicablement, de se donner la mort, laissant les deux autres à leur douleur et leur solitude.

Empruntant des chemins différents, Watanabe et Naoko se revoient fortuitement quelque temps plus tard. S’il mène l’apparence d’une vie d’étudiant sans histoire, elle semble pour sa part perdre pied, s’enfonçant toujours un peu plus dans le souvenir du disparu. Au gré de rencontres successives, elle entraîne bientôt insensiblement Watanabe dans son monde, au moment même où il fait la connaissance de la déroutante Midori. Entre les échos persistants d’un impossible amour et l’hypothèse d’une reconstruction qui l’arracherait à sa mélancolie, le jeune homme évolue bientôt dans un horizon incertain, son existence et tout son être apparaissant comme suspendus.

Relais de l’âme

Histoire d’amour et de deuil, de tourments et d’apaisements, La Ballade de l’impossible trouve, devant la caméra de Tran Anh Hung, des accents mortuaires et glacés, en même temps qu’étrangement sensuels. Si le film apparaît de prime abord quelque peu figé dans son ambition esthétique, la distance adoptée n’en dispense pas moins un trouble certain, admirablement relayé par la musique de Jonny Greenwood, de Radiohead, qui, plutôt que se borner à appuyer des émotions, semble en prise directe sur l’âme des protagonistes. Et se fait l’écho des sentiments contrastés qui les habitent, des plus tendres aux plus violents, traduits par Tran Anh Hung avec une confondante douceur ouvrant sur une profonde mélancolie.

Au-delà, on ne peut qu’être ébloui par la stupéfiante beauté de Norwegian Wood, le premier film du réalisateur d’origine vietnamienne à parvenir sur nos écrans depuis dix ans et le magnifique A la verticale de l’été. Tran Anh Hung réussit, au gré d’une mise en scène gracieuse, à faire vibrer au diapason des plans qui sont autant de compositions soignées. Affirmant sa foi dans le cinéma comme expérience esthétique et sensorielle autant que narrative, le cinéaste capte quelque chose d’indicible qui tient à la fois de la mort et de la vie, des amours perdues et du temps retrouvé, pour donner à ce drame délicat mais puissant des contours aussi paradoxaux que séduisants.

Norwegian Wood, drame de Tran Anh Hung, avec Kenichi Matsuyama, Rinko Kikushi, Kiko Mizuhara. 2h13.

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Jean-François Pluijgers

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