Filles et fils de au cinéma: « Je ne le considère absolument pas comme un mentor »

Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

Sofia Coppola, Asia Argento, Samira Makhmalbaf, Gorô Miyazaki, Romain Gavras, Louis Garrel, Mathieu Demy… Les cinéastes « filles et fils de » sont légion dans le circuit du 7e art aujourd’hui, les uns et les autres se dépêtrant plus ou moins librement avec le parfois lourd héritage qui pèse sur leurs épaules. Focus en a croisé une triplette au gré de récents festivals de cinéma. Portraits express.

Brandon Cronenberg

Filles et fils de au cinéma:

« Je ne le considère absolument pas comme un mentor, et d’ailleurs on ne parle pas tant que ça de cinéma tous les deux, mais il est un fait que j’ai beaucoup appris en l’observant travailler. » Avec Antiviral, en 2012, le rejeton nerdy de David Cronenberg, trentenaire discret basé à Toronto, a d’emblée trouvé sa voie cinématographique tout en ayant l’intelligence de ne pas dénier une obsession pour le corps dans ce qu’il a de plus monstrueux qui évoque d’évidence certaines oeuvres de son paternel. « Antiviral reflète quelques-unes de mes obsessions les plus profondes en tant que personne et, arrivé à un certain stade du processus créatif, j’ai en effet décidé en toute conscience d’arrêter d’éviter les possibles correspondances qu’il y aurait lieu de trouver là avec le cinéma de mon père. Il serait idiot, et certainement fort peu honnête de ma part, de chercher absolument à me construire en opposition par rapport à lui. » Variation singulière sur le film de vampires, ce premier long imagine un monde baignant dans une blancheur étrangement immaculée où le commun des mortels tient la célébrité à ce point comme une nouvelle religion qu’il est prêt à payer le prix fort pour se faire injecter les virus ayant eu l’heur d’affecter ses idoles. Troublant.

Jonás Cuarón

Filles et fils de au cinéma:

Gamin, à 10 ans à peine, il joue déjà devant la caméra deson padre. Quinze ans plus tard, en 2007, il réalise son premier long métrage puis un court dérivé du livre de Naomi Klein, The Shock Doctrine. Mais c’est bien en co-écrivant le scénario du Gravity (2013) de son père Alfonso que Jonás Cuarón accède à la notoriété internationale. « J’adore travailler avec lui. C’est un collaborateur fiable et exigeant, et c’est avant tout ainsi que je le vois quand nous développons un projet ensemble. Il m’a soutenu depuis mes débuts en tant que cinéaste, tout comme mon oncle Carlos, qui est également scénariste, producteur et réalisateur. » En complément de Gravity, Jonás tourne Aningaaq, le court métrage spin-off qui rejoue la scène de l’appel désespéré de Sandra Bullock dans le film mais du point de vue de l’Inuit isolé sur sa banquise avec lequel elle parvient brièvement à entrer en communication. L’an dernier, il fait le tour des festivals avec son Desierto, soufflant survival où il orchestre la confrontation brutale entre un clandestin mexicain qui cherche à traverser la frontière pour rejoindre son fils (Gael Garcia Bernal) et un redneck américain prêt à tirer sur tout ce qui bouge (Jeffrey Dean Morgan) dans les grands espaces désertiques du sud de la Californie.

Zoe Cassavetes

Filles et fils de au cinéma:

Un Los Angeles passé au filtre de la mélancolie, une bande-son synthétique, les excentricités et cruels retours de bâton propres au milieu tout sauf doré du 7e art, une scène rigolo-dépressive tournée au Château Marmont: impossible de ne pas penser au cinéma de… Sofia Coppola, une autre « fille de », à la vision de Day Out of Days, le dernier film en date, huit ans après Broken English, de la cadette du couple mythique jadis formé par John Cassavetes et Gena Rowlands. Soit le récit de la douloureuse quête de sens d’une actrice, Mia (Alexia Landeau, désarmante), fraîche quadragénaire à la gloire déjà fanée, et à l’amour-passion carambolé dans les plis et le poids des années partagées. Et une énième variation, au spleen contagieux même si parfois un peu outré, sur l’envers du rêve hollywoodien. Zoe Cassavetes, une femme sous influence? « La question de l’impact que mes parents ont pu avoir sur mon travail, je suis sans doute condamnée à y répondre jusqu’à la fin de mes jours, mais c’est bon, je suis ok avec ça, je respecte tellement ce qu’ils ont accompli… Ce qu’ils m’ont transmis avant toute chose? L’amour du cinéma et l’amour de la famille. Faire ce que l’on aime et aimer les gens avec qui on le fait.« 

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