Critique

[Critique ciné] Hidden Figures, équation à trois inconnues

Viola Davis, Taraji P. Henson et Janelle Monae dans Hidden Figures, de Theodore Melfi. © DR
Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

FILM BIOGRAPHIQUE | Combatif et plaisant, un hymne aux héroïnes oubliées -parce que noires- de la conquête de l’espace.

Le concept d' »empowerment » est devenu essentiel aux États-Unis dans le cadre d’une société où la place des minorités n’est toujours pas celle qu’elles méritent et revendiquent. Faute d’équivalent linguistique (1), on le définit en français comme l’octroi de davantage de pouvoir aux individus ou aux groupes pour agir sur les conditions sociales, économiques, politiques ou écologiques auxquelles ils sont confrontés. Hidden Figures vient à point nommé illustrer l’empowerment à travers le portrait en mouvement de trois femmes afro-américaines et de leur apport méconnu à la conquête de l’espace. Katherine Johnson, Dorothy Vaughn et Mary Jackson faisaient partie de la vingtaine d’employées « de couleur » travaillant comme calculatrices à la NASA au tournant des années 60. C’était l’époque de la course à l’espace, opposant les Etats-Unis et l’URSS dans un contexte de haute tension nucléaire. Chacune de ces trois femmes s’illustra de manière différente au service de la cause nationale: envoyer un homme en orbite autour de la Terre. Les Russes allaient brûler la politesse aux Américains en y expédiant Youri Gagarine le 12 avril 1961, John Glenn devant attendre le 20 février 1962 pour égaler cet exploit. Les calculs de la mathématicienne surdouée qu’était Katherine Johnson eurent leur importance dans la réussite de sa mission. Mais elle devait plusieurs fois par jour marcher des centaines de mètres pour rejoindre les toilettes réservées aux « colored people »…

Premières

[Critique ciné] Hidden Figures, équation à trois inconnues

Librement inspiré de personnages et de faits réels, Hidden Figures a le double mérite de rétablir une vérité historique jusqu’ici tue, sinon cachée, et de le faire sur un mode de spectacle populaire évitant de prêcher les seuls convaincus, militants de la cause afro-américaine. Ce faisant, il n’évite ni certaines facilités narratives, ni prime aux (bons) sentiments. Mais il nous fait vibrer, avec humour souvent, au combat quotidien de trois femmes qui établirent des premières. Katherine Johnson en étant la première Noire à intégrer le saint des saints de la NASA, Dorothy Vaughn en devenant la première Noire nommée superviseur pour ordinateurs IBM, et Mary Jackson en étant (suite à une décision judiciaire) la première Afro-Américaine à pouvoir fréquenter les cours d’une université « blanche » de Virginie (elle y obtint son diplôme d’ingénieur). À l’heure où Barack Obama quitte la Maison Blanche sans avoir pu empêcher un record de bavures policières à connotation raciste, le cinéma fait bien de rappeler certaines choses à un pays toujours divisé. Comme le fait qu’en même temps qu’elle envoyait un astronaute en vol orbital, l’Amérique des discriminations tenait toujours le gouvernail de plus d’un État du Sud. Hidden Figures est utile, et fait plaisir. Bien sûr, et malheureusement, il en est encore qui auront du mal à le calculer…

(1) Les Québécois parlent d' »autonomisation » mais le terme est -nettement- moins fort que l’original anglais.

De Theodore Melfi. Avec Taraji P. Henson, Octavia Spencer, Janelle Monae. 2 h 07. Sortie: 01/02. ***(*)

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