Critique

Critique ciné: Exodus: Gods and Kings, buisson creux

Christian Bale dans Exodus: Gods and Kings © DR
Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

PÉPLUM | Ridley Scott s’attaque au livre de l’Exode dans un film éminemment spectaculaire, mais manquant cruellement de distance.

Signe des temps, peut-être, quelques mois après le Noah de Darren Aronofsky, voici Exodus: Gods and Kings de Ridley Scott, un film confirmant le retour fracassant du péplum biblique dans le versant blockbusters du paysage cinématographique. Comme Cecil B. de Mille avant lui, le réalisateur de Gladiator s’y attaque au second livre de l’Ancien Testament, relatant l’exode hors d’Egypte du peuple hébreux se libérant de l’esclavage sous la conduite de Moïse. Cette histoire, Scott la place sous le signe du grand spectacle -certifié d’entrée par la bataille opposant Egyptiens et Hittites-, et de la relation complexe s’instaurant entre Moïse (Christian Bale) et Ramsès (Joel Edgerton), demi-frères élevés à la cour d’Egypte. Et que le destin, une fois les origines juives du premier révélées, va se charger de séparer, avant de les contraindre à s’affronter. Une geste prenant une tournure sacrée après l’épisode du Buisson ardent, lorsqu’un Dieu vengeur (qui lui apparaît sous les traits d’un jeune garçon (sic!)) ordonne à Moïse de s’élever contre la puissance du pharaon pour affranchir 400 000 Israélites du joug égyptien.

Christian Bale fait le Job

Des dix plaies d’Egypte à la traversée de la Mer Rouge, la suite offre matière à Ridley Scott à étaler un savoir-faire qu’il a résolument démonstratif. Du Nil transformé en mer de sang par des sauriens voraces, aux grenouilles tombant dru, et jusqu’aux visages balafrés de pustules, le rendu est aussi saisissant que complaisant, l’ampleur du châtiment ayant pour pendant son raffinement dans la cruauté, culminant dans un dernier fléau, la mort des premiers-nés d’Egypte. « Quel fanatique faut-il être pour vénérer un Dieu qui ordonne cela? », demandera Ramsès à Moïse. Et de fait, il semble loin, le Spartacus qu’avait pu un temps évoquer le libérateur, à l’abri de toute chapelle.

Dans la foulée, et quand bien même Exodus impressionne par sa facture (soutenue à grand renfort d’effets spéciaux), il est d’autres questions que le film laisse en suspens. La principale tient précisément au premier degré présidant à une entreprise à ce point dénuée de distance qu’elle ressemble à quelque vestige d’une autre époque: violemment littérale au point de laisser perplexe, à tout le moins. L’adhésion est donc toute relative, sentiment encore renforcé, mais c’est là plus anecdotique, par une longueur excessive -la sauce retombe mollement après l’épisode de la Mer Rouge, mais soit, il fallait bien aller jusqu’aux Dix Commandements- et une distribution inégale. Si Christian Bale fait le Job, avec le charisme sinon la puissance de Russell Crowe, Joel Edgerton apparaît plus fadasse, tandis que Ben Mendelsohn est caricatural. Quant aux autres, les Ben Kingsley, Sigourney Weaver, Golshifteh Rafahani et autre Hiam Abbass, ils ne sont là que pour faire tapisserie dans cet exode un brin exténuant…

  • DE RIDLEY SCOTT. AVEC CHRISTIAN BALE, JOEL EDGERTON, BEN KINGSLEY. 2H30. SORTIE: 17/12.
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