Comment le créateur de Napster veut torpiller le cinéma traditionnel

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Kevin Dochain
Kevin Dochain Journaliste focusvif.be

The Screening Room, le projet de Sean Parker qui veut diffuser les films à la maison dès le jour de leur sortie en salles, pour 50 dollars, suscite une impressionnante levée de boucliers à Hollywood. Décryptage.

Si le Festival de Cannes bat son plein et reste l’un des meilleurs endroits pour prendre le pouls du cinéma international, en avril se déroulait également, à des milliers de kilomètres, le CinemaCon de Las Vegas, idéal pour en savoir plus sur l’avenir des salles obscures. Et cette année, comme le rappelle le Nouvel Obs, tous les professionnels du milieu n’avaient qu’un seul mot à la bouche: Screening Room, projet de Sean Parker qui inquiète le tout-Hollywood.

À la tête d’une fortune évaluée à 2,4 milliards de dollars, l’homme d’affaires de 36 ans, incarné par Justin Timberlake dans le film The Social Network, est aussi influent que controversé dans la Silicon Valley. Premier président de Facebook, il est surtout accusé d’avoir torpillé l’industrie du disque en fondant Napster, et fait aujourd’hui grincer des dents à Hollywood avec son projet de home-cinéma Screening Room (« salle de projection »).

À l’heure où la révolution du streaming crispe aussi les cinémas, après le lancement par Netflix et Amazon de films au générique prestigieux comme Beasts of No Nation ou Chi-raq, de Spike Lee, diffusés simultanément en salles et en streaming, le projet de Sean Parker fait grincer des dents. Avec Screening Room, il veut en effet rivaliser directement avec les exploitants en offrant des films en première exclusivité à la maison, remettant en cause la « fenêtre » traditionnelle entre la sortie en salles des films et leur sortie en DVD, VOD ou streaming.

50 dollars le film

Avec l’achat requis d’un boîtier pour 150 dollars et de chaque titre pour 50 dollars pièce, il est a priori bien plus coûteux qu’un ticket de cinéma, mais peut être rentabilisé pour un groupe d’amis, et revient moins cher qu’une baby-sitter pour les parents qui veulent s’offrir une toile. D’après la proposition, les exploitants de salles et les studios récolteraient jusqu’à 20 dollars sur les 50 facturés par film.

Le service compte quelques réalisateurs prestigieux parmi ses partisans: Martin Scorsese, Steven Spielberg et Peter Jackson, qui a souligné dans une déclaration au magazine Variety que Screening Room était conçu pour « un public qui ne va pas actuellement au cinéma ». Mais l’association américaine des exploitants (NATO) et celle des salles d’arts et d’essai Art House Convergence ne l’entendent pas de cette oreille, sonnant l’alerte face à une « dévaluation » de l’expérience en salles et un « embrasement du piratage ».

Chaque innovation dans l’audiovisuel, de la cassette vidéo au DVD en passant par l’internet haute vitesse, suscite une levée de boucliers et des sombres présages sur la mort du cinéma. Pour autant, le public des salles de cinéma est resté quasi stable sur 50 ans tandis que le box-office nord-américain se maintient autour de 10-11 milliards de dollars depuis 2009.

Avec l’AFP

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