Ce collectif se présente aux élections uniquement pour afficher de l’art au lieu des tracts

Des panneaux et des affiches, oeuvres de Michel Battle © Party Content

Pour son Élexposition, Party Content, « le parti Chasse et Pêche de l’art contemporain », a pour objectif de transformer à Liège les panneaux d’affichage électoraux en exposition. Mais pour ça, il faut se présenter aux élections…

Quand on lui demande où il en est, Maxime Moinet répond qu’il aimerait terminer aujourd’hui, que la récolte avance bien. Autour de lui, le cagnard. La canicule tape sur la peau. C’est un grand bonhomme, assis sur une petite chaise. À sa gauche, une série de panneaux d’affichage. Comme ceux qu’on découvre à la veille d’une élection. Ici, ce ne sont pas les paires d’yeux des candidats qui nous regardent. Ces panneaux exposent de l’art contemporain. Tout est normal, la confusion est prévue. Ce mélange des genres, c’est le Party Content.

Il n’y a pas de vendanges, pas de moissons. Maxime Moinet est à la recherche de signatures. « Pour se présenter aux élections, il faut soit les signatures de deux conseillers communaux sortants, soit celles de 100 citoyens« , détaille-t-il. Les citoyens en question, ce sont les Liégeois. Parce que Party Content a une ambition, muer la campagne électorale en exposition.

Et ça fonctionne. Le projet se concrétise. Le collectif veut se réapproprier la ville pour confronter ses habitants à l’art contemporain. Pour l’instant, on connaît la fin du happening. Le quatorze octobre 2018, jour du scrutin. Le début n’est pas encore fixé. Party Content estime la campagne à un mois. 30 jours pour marquer, pour s’intégrer à la routine électorale.

Des affiches pour confronter

Tout a commencé il y a trois ans. Une idée. Et puis un temps de gestation pour oser. Une bande d’historiens de l’art et d’artistes. Depuis octobre 2017, Party Content, c’est une soirée par mois. Pour lancer le projet et pour exposer. Avec un point névralgique: l’Escalier. Un lieu où l’on vient boire un verre et où l’on finit devant une exposition sur trois étages. « Les visiteurs y ont un regard frais, neuf et les discussions sont toujours bonnes. C’est ce nouveau public que l’on veut toucher« , s’enthousiasme Maxime Moinet.

Le support exclusif de la campagne, c’est l’affiche. Des impressions photos, des QR codes pour vidéo, des annonces de performances. Les artistes peuvent intervenir directement dessus. La seule contrainte, c’est le nombre d’espaces d’affichage. Le reste est libre. Et parmi les participants, il y a de grands noms. On attend Joshua Citarella, le photographe de studio. Mais aussi Peter Holden, Ben Vautier ou encore Kendell Geers. « On a réussi à avoir les Guerrilla Girls, elles ont été directement emballées par le projet« , raconte le curateur de Party Content, encore un peu plus enthousiaste.

L’art contemporain que l’on ne va pas chercher au musée. Des oeuvres qui s’exposent à la ville, qui s’intègrent à l’habitude. Party Content attend le jour où la performance sera quelque chose de commun avec impatience. 33 panneaux dans Liège, autant d’espaces d’exposition. À chacun son contenu. Et derrière le happening artistique, il y un acte politique.

Un instinct de détournement

Rendre visible c’est porter secours. Ça, c’est de Georges Didi-Huberman. Là où le philosophe français rejoint Party Content, c’est dans l’idée de surprendre l’oeil. L’inattendu crée des histoires. Il rend la vie à ce qui est dans l’ombre. Confronter les liégeois à l’art contemporain, mais pas que. Les politiciens aussi.

Maxime Moinet déplore la situation de l’art à Liège. La Cité Ardente manque d’infrastructures. Il n’y a pas de place pour le contemporain. « La verrière construite par Rudy Ricciotti à la Boverie est conçue pour accueillir ce type d’oeuvre. En dernière minute, le statut du musée a changé. Ce sont des expositions qui tournent, maintenant. Les collections permanentes sont en sous-sol« .

Et s’ils sont élus? Là, c’est la grande inconnue. Pas beaucoup d’espoir mais un constat qui fait sourire. « On verra le quinze octobre. Mais peut-être que ceux qui en ont ras-le-bol voteront Party Content au lieu de blanc« . Qui sait.

Avec sa liste, Party Content espère mettre son grain de sable dans les rouages de la machine politique liégeoise. La prétention de gouverner en moins. « On est vraiment le parti Chasse et Pêche de l’art contemporain. »

En attendant, le collectif prévoit une exposition le 14 septembre à l’Escalier, avec toutes les affiches collées en rue. Infos: www.partycontent.be

Victor Huon

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