L’oeuvre de la semaine: Écrire avec le vent

Écriture 7.10.82. c Jephan de Viliers © c Jephan de Viliers
Guy Gilsoul Journaliste

Le petit enfant, de santé fragile, sortait peu du jardin de sa grand-mère puisque la conversation avec un marronnier suffisait à son bonheur. C’est là, à l’ombre du grand arbre qu’il fabriqua son premier village de terre et d’écorces.

De la région versaillaise, Jephan de Villiers gagna Londres où il vécut avec un perroquet, le temps de devenir sculpteur. En plâtre cette fois, il leva des écritures en 3D ainsi que les premières figures filiformes aux allures totémiques et des êtres primitifs dont la tête pastillée gardait la bouche ouverte. Le hasard le conduisit en 1976, il avait déjà 36 ans, dans la grande hêtraie de la forêt de Soignes. Ce fût le déclic. Les troncs épais, les feuillages ailés et au sol, ces mémoires du temps qui passe devenaient aussitôt « son « histoire. Avec des fragments de nature, des plumes d’oiseaux ramassées sur l’humus des sous-bois et de la mie de pain pour inscrire les visages sur des corps de feuilles sèches, il devenait le maître d’un lieu imaginaire qu’il nomma « L’Arbonie ». Installé au plus près de son protecteur et ami, le céramiste et collectionneur d’art africain Simon du Chastel il s’installe alors à Boitsfort, en lisière de sa forêt jusqu’en 1999 quand il gagne la Charente maritime et le village de Mirambeaux où il vit aujourd’hui. Depuis, l’oeuvre se décline en processions d’êtres de feuilles entourant des chariots de bois portant rois, anges, orants, suivants et oeufs de papier couverts de mots illisibles. Le peuple avait donc sa propre écriture faite de gestes chorégraphiques, légers et virevoltants. Des gestes de sculpteur d’espaces, emmenés par le poids de l’encre et la tiédeur du support. L’écriture est au menu de l’exposition présente. On pourrait avec justesse oser quelques parallèles avec les logogrammes de Christian Dotremont mais c’est davantage aux oeuvres graphiques d’un Chillida que je songe même si eux, se nourrissent des mouvements océans du pays basque et de ses sous-sols de pierre et de fer plutôt que de la vie souterraine du végétal.

Bruxelles, Bibliotheca Wittockiana. 23 rue Bemel. Jusqu’au 16 septembre. Du mardi au dimanche de 10h à 17h.

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