Cannes, côté lauréats

RETOUR SUR UN PALMARÈS 2016 CONTRASTÉ À LA FAVEUR DES SORTIES DE I, DANIEL BLAKE DE KEN LOACH, THE SALESMAN D’ASGHAR FARHADI ET JUSTE LA FIN DU MONDE DE XAVIER DOLAN.

I, Daniel Blake

DE KEN LOACH. AVEC DAVE JOHNS, HAYLEY SQUIRES. 1H40. DIST: TWIN PICS.

7

The Salesman

DE ASGHAR FARHADI. AVEC SHAHAB HOSSEINI, TARANEH ALIDOOSTI. 1H58. DIST: TWIN PICS.

7

Juste la fin du monde

DE XAVIER DOLAN. AVEC GASPARD ULLIEL, MARION COTILLARD. 1H37. DIST: TWIN PICS.

3

En gratifiant, le 22 mai dernier, Ken Loach d’une seconde Palme d’or pour I, Daniel Blake, le jury du 69e festival de Cannes provoquait la surprise -une de plus pour un palmarès s’étant employé à déjouer les pronostics. Difficile en effet de ne pas éprouver un sentiment de déjà-vu à la découverte de ce film suivant les évolutions d’un menuisier de Newcastle approchant la soixantaine, qu’un accident cardiaque contraint à faire appel aux services sociaux. Le début d’un cauchemar administratif au cours duquel il va croiser une mère célibataire « délocalisée » de Londres avec ses deux enfants. Et le duo de faire front dans l’adversité. En prise sur la réalité sociale de l’Angleterre, I, Daniel Blake dépeint les ravages humains du libéralisme sans freins. Le constat est glaçant, pour un film ayant fait de la colère son carburant principal, qu’il assortit d’un refus de céder à la résignation. Soit une Palme politique, urgente et nécessaire à défaut de renouveler la grammaire du réalisateur. Celui-ci fait l’objet, en bonus, d’un formidable documentaire de Louise Osmond, Versus: the Life and Films of Ken Loach, dévoilant à la fois l’homme et le cinéaste, et remontant aux sources de son engagement politique comme artistique. Indispensable pour quiconque s’intéresse à l’auteur de Raining Stones.

Asghar Farhadi a, pour sa part, quitté la Croisette fort du prix du scénario, doublé de celui d’interprétation masculine pour Shahab Hosseini. On ne criera pas là non plus au scandale, même si le cinéaste iranien est déjà apparu plus en verve qu’avec l’histoire d’Emad et Rana (Taraneh Alidoosti), un couple de comédiens qui, leur immeuble menaçant de s’effondrer, se voit contraint de s’installer dans un nouveau logement, circonstances qui vont avoir des conséquences dramatiques lorsque la jeune femme y est l’objet d’une agression. Renouant avec ses racines théâtrales, Farhadi fait rimer leur destin avec Mort d’un commis voyageur, d’Arthur Miller. Mais s’il poursuit ici son exploration du couple et de la société iranienne, la construction est artificielle, et l’auteur de Une séparation semble quelque peu prisonnier d’un système. Making of en bonus.

Enfin, on mentionnera surtout pour la forme Juste la fin du monde, opus ayant valu à Xavier Dolan un Grand Prix inexplicable. Douze ans après avoir quitté les siens, Louis, un dramaturge, est de retour avec l’intention de leur annoncer sa mort prochaine. Débutant sous haute tension, la réunion de famille qui s’ensuit est frappée du sceau de l’incommunicabilité et des névroses de chacun, pour un film déclinant l’hystérie sur tous les tons. On est loin, en tout état de cause, de la fulgurance de Mommy.

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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