London burning

Le tubiste de Sons of Kemet sort son premier album solo. Un condensé de jazz multiculturel made in London.

N’en déplaise aux industries du disque et du concert (qui prennent un malin plaisir à mettre la charrue avant les boeufs, à faire sortir des disques à des groupes de toute évidence pas prêts et à les programmer sur des scènes bien trop grandes pour eux), Theon Cross sort son premier album solo mais n’est pas pour autant le premier venu. Theon est un pote du patron de la scène londonienne Shabaka Hutchings et le tubiste de son groupe Sons of Kemet dont il secoue irrépressiblement les concerts. Il officie aussi avec Brass Mask, le Moses Boyd Exodus et le SEED Ensemble. À Londres, dont on ne cesse de vanter le renouveau jazz, Theon est le roi du tuba. Il lui a d’ailleurs insufflé une nouvelle énergie, un son unique et funky.

London burning

Passé par Flagey en janvier dernier, le garçon joue des cuivres depuis qu’il a huit ans. Rejoignait à douze piges une fanfare de carnaval et commençait le tuba à quatorze, séduit qu’il était par ses lignes de basse. Aujourd’hui âgé de 26 ans et diplômé de la Guildhall School of music and drama, il a épaulé en studio des rappeurs américains (Pharoahe Monch) comme des pop stars japonaises (Ayumi Hamasaki). Joué avec des légendes du grime (Kano) et des pointures de la Nouvelle-Orléans (Jon Batiste).

Ces derniers mois, Theon a promené son tuba et son prénom Game of Thrones sur la compilation We Out Here concoctée par le label Brownswood de Gilles Peterson et sur la mixtape Where We Come From du batteur et producteur chicagoan Makaya McCraven.

Clash

Après Aspirations en 2015, EP autoproduit sur lequel on retrouvait déjà Moses Boyd à la batterie et Nubya Garcia au saxophone, Theon Cross est donc de retour avec Fyah. Un album de jazz varié, métissé qui a dans le sang et porte dans son ADN le multiculturalisme londonien. On trouve ici du jazz, forcément. Mais on sent aussi l’influence des musiques caribéennes, du dub jamaïcain, du hip-hop, de l’afrobeat et de l’électronique.

Fyah a le sens du groove. Et Candace of Meroe (hommage à une reine éthiopienne) définitivement des airs de Fela Kuti.

Quelques guests (le frère de Theon, Nathaniel, au trombone, Wayne Francis au saxophone et Artie Zaitz à la guitare électrique) sont venus donner un coup de main mais c’est essentiellement sur la triplette magique (Cross-Boyd-Garcia) que repose ce disque de jazz moderne et universel. Il y a tout juste 40 ans, The Clash sortait London Calling. Son punk métissé secouait la capitale britannique et l’establishment. Cross a intitulé le dernier morceau de son disque LDN’s Burning. Et c’est plus qu’un clin d’oeil. Son disque incarne le renouveau du jazz britannique et appelle à la mixité et au mélange sous toutes leurs formes. Assurément l’un des albums jazz de ce début d’année.

Theon Cross

« Fyah »

Distribué par Gearbox Records.

8

Le 16/05 au Mithra Jazz (Liège) avec le Sun Ra Arkestra.

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