Ondes de doc: trois docus marquants à voir au festival Millenium

Dans la terrible jungle © DR
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Vitalité contre le handicap, solitude du motel américain et Montée du nationalisme slovaque. Zoom sur trois documentaires marquants du festival bruxellois Millenium.

Lancé en 2009 à Bruxelles par le Bulgare Lubomir Gueorguiev et sa compagne Zlatina Rousseva, le Festival international du film documentaire Millenium met en lumière des films s’attaquant aux grands enjeux et objectifs du XXIe siècle tels que définis en l’an 2000 par les Nations Unies. Cette année, du 22 au 30 mars, du Palace au Cinéma Vendôme en passant par Bozar, les Galeries, le Civa et l’Aventure, l’événement s’articulera autour de quelques grands thèmes: la consommation effrénée, les défis environnementaux, les droits des femmes, la face cachée des réseaux sociaux et celle de l’Amérique d’aujourd’hui. Retour sur trois docus qui ont retenu notre attention.

Dans la terrible jungle

Documentaire d’Ombline Ley et Caroline Capelle. ****

Le 24/03 à 19 h, au Cinéma Vendôme. Compétition Vision jeune.

Pour leur premier long métrage, Ombline Ley et Caroline Capelle sont parties promener leur caméra dans un centre d’accueil. On est à La Pépinière, dans les Hauts-de-France, avec des adolescents pas comme les autres mais comme les autres quand même. Ils sont atteints de déficience visuelle, de handicaps rares. Ils font de la musique en se brossant les dents et pètent des câbles en passant la tondeuse. Mais eux aussi se chamaillent, dansent sur Michael Jackson, suivent des cours et rêvent de rencontrer l’amour.

Dans la terrible jungle ne propose pas une immersion traditionnelle en institution. Les deux réalisatrices qui se sont rencontrées à l’École nationale des arts décoratifs signent une oeuvre plus singulière. La réalité s’y mêle à la fiction. Des moments documentaires à des scènes jouées. Il y a Alexis avec son sweatshirt Superman et son masque de Batman. Léa dont on ne capte pas tout de suite le retard et qui chante depuis qu’elle a huit ans et écrit des scénarios… Il faut dire qu’à La Pépinière, cet univers fermé, coupé du monde mais pas de la nature, les résidents sont stimulés, font autant de musique que de jardinage. Ils osent même reprendre, de manière toute personnelle, Les Bêtises de Sabine Paturel. Beau, musical et drôle, un film qui ne manque ni de joie ni d’énergie.

Vacancy

Documentaire d’Alexandra Kandy Longuet. ***(*)

Le 27/03 à 19 h, au Cinéma Galeries. Compétition belge.

Vacancy
Vacancy

On connaît tous le poussiéreux Bagdad Café, non loin de Las Vegas, longeant la célèbre Route 66. Celui terrifiant, aussi, de Norman Bates surplombé par la maison familiale dans Psychose… Le motel n’est pas qu’un décor pour grands films de cinéma. C’est aussi surtout aux États-Unis une véritable institution. Le repaire de laissés-pour-compte, le rendez-vous d’humains à la dérive. Symbole décrépissant d’un American dream qui a viré au cauchemar.

La réalisatrice Alexandra Kandy Longuet est partie filmer quelques habitués de certains d’entre eux. Propreté douteuse, cris des voisins, impacts de balle dans les portes… Des gros tatoués se lavent le crâne et se rasent avec un tuyau d’arrosage, une femme parle de ses déboires et rêve déjà de sa Vicodin pour accompagner le café du matin… La mort de leur conjoint, la perte de leur maison: certains ont débarqué dans ces motels pour un mois et y sont encore après des années. Ils conservent et continuent de payer un garde-meubles pour se donner l’espoir d’un jour retrouver un foyer. Même quand ils savent pertinemment que ça n’arrivera jamais.

« Tu dois payer ou tu dois partir… » Pas évident quand on joue l’argent du loyer et parfois celui de son crack… Superbement filmé dans ces grands espaces abandonnés, au plus près des visages, de ces parcours de vie cabossés et de leurs cicatrices, Vacancy dépeint une facette sombre, misérable et solitaire de la société américaine.

When the War Comes

Documentaire de Jan Gebert. ***(*)

Le 28/03 à 20 h 45, au Cinéma Aventures. Compétition internationale.

When the War Comes
When the War Comes

Dans leur tenue de camouflage, ils regardent des familles de migrants arriver, parlent de colonisation, regrettent de ne pas avoir d’arme avec eux. Ils, ce sont des « Slovenski Branci ». Quelques « recrues slovaques », membres d’un groupe paramilitaire dirigé par Peter qui les enrôle avec l’accord tacite des autorités du pays. La mission qu’ils se sont fixée? Préserver et protéger la nation. Combattre les vices de notre société. Pas de cigarette, pas d’alcool, pas de drogues! Camp d’entraînement dans les bois. Fringués comme des soldats, ils rampent sous des barbelés, apprennent à se servir d’une arme, à utiliser un masque à gaz… « Vous n’allez pas m’aimer », hurle le fondateur et chef suprême à ses petits nouveaux qui se préparent à « une guerre inévitable ».

When the War Comes s’immerge dans le monde étriqué d’une jeunesse d’extrême droite qui veut rester fidèle à son sang slave… Gebert se glisse dans son quotidien. Montre comment Peter et ses idées nauséabondes essaient de contaminer des enfants dans les écoles. Drapeaux, balaclavas et démonstrations de combat: il observe aussi comment le jeune homme prépare son avenir en politique, comment la rage monte dans les voix et la haine se renforce sur les visages. Une plongée effrayante dans l’ultranationalisme.

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