Scène de la vie conjugale

De retour d’un séjour en montagne, le narrateur, qui achève un essai consacré à Scènes de la vie conjugale d’Ingmar Bergman, découvre une culotte maculée de sperme. Il comprend que sa compagne le trompe et qu’elle souhaite le lui faire savoir: « (…) elle attendait de voir la tournure qu’allait prendre notre échange nécessaire et imminent. » Il s’agit donc de faire une scène, inévitable, courue d’avance: où tous deux, côte à côte dans le lit conjugal, donnent la réplique à l’affiche de Bergman. S’ensuit une conversation qui dure toute la nuit: une joute où le roman devient huis clos obsessionnel sur la question du coït extraconjugal. Outre le modèle du couple Marianne/Liv Ullmann et Johan/Erland Josephson, on songe au Eyes Wide Shut de Kubrick, tant les protagonistes, à qui il est impossible de surseoir à la volonté de comprendre, cèdent à la tentation venimeuse d’ausculter les méandres inextricables de la pensée. Alors, adultère mode d’emploi? Comme l’héroïne rejoint son ancien amant, c’est sans passion dévorante, sans transports particuliers non plus, que nous éprouvons l’exercice de style. Quelle qu’en soit la gymnastique sophistiquée, l’implacable ressassement nocturne nous apparaît pareil au vrombissement infatigable d’une mouche: « Nous tournions peut-être un peu en rond après tout. »

De Philippe Limon, éditions Gallimard (L’infini), 168 pages.

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