Reflets dans un OEil d’or

Apparu au début des années 2000 dans un paysage festivalier ultraconcurrentiel sinon saturé, le Zurich Film Festival n’a pas tardé à s’y faire une place en vue. Avec ses 104 000 spectateurs, la 14e édition, bouclée le 7 octobre dernier, peut ainsi être qualifiée de franche réussite, à la fréquentation en hausse constante s’ajoutant la qualité de la sélection réunie pour l’occasion. Une sélection dont l’on retiendra, au chapitre des distinctions, que Girl, du cinéaste belge Lukas Dhont, a remporté l’OEil d’or du meilleur film, trophée venu s’ajouter à ceux, nombreux, glanés depuis la Caméra d’or du dernier Festival de Cannes.

À l’instar de Gand sous nos latitudes, Zurich tient, pour partie, du best of de la production des derniers mois et l’on a pu y (re)voir, parmi d’autres, Shoplifters d’Hirokazu Kore-eda, Roma d’Alfonso Cuarón, Cold War de Pawel Pawlikowksi et The Favourite de Yorgos Lanthimos, tous déjà salués par ailleurs. Le ZFF peut également se targuer d’aligner son lot de premières de prestige, de quoi séduire le grand public tout en déflorant la saison cinématographique à suivre. La tendance 2018 va, sans grande surprise, aux histoires vraies et autres biopics, avec notamment Green Book, présenté en ouverture, road movie où Peter Farrelly (coréalisateur, avec son frère Bobby, de Dumb and Dumber et There’s Something About Mary, maillons essentiels de la comédie américaine contemporaine) s’aventure du côté du drame en compagnie de Viggo Mortensen (invité prestigieux de la manifestation, au même titre que Donald Sutherland, Judi Dench ou Johnny Depp) et Mahershala Ali, partis, au coeur des années 60, sur les routes d’un Sud étatsunien en proie aux préjugés raciaux. Avec Colette aussi, impeccable biopic de Wash Westmoreland ( Still Alice) doublé d’un manifeste féministe incarné avec fougue par Keira Knightley. Ou avec Kursk encore, où Thomas Vinterberg reconstitue, en compagnie de Matthias Schoenaerts et Léa Seydoux notamment, l’épopée tragique du sous-marin nucléaire russe échoué au fond des mers en l’an 2000. Et l’on en passe, comme Beautiful Boy, du cinéaste gantois Felix Van Groeningen, dont le premier film américain, inspiré de la réalité toujours, arpente la relation sinueuse entre un père (Steve Carell) et son fils (Timothée Chalamet), accro aux drogues dures ou, dans un autre registre, Loro 1, portrait de Silvio Berlusconi à la mode de Paolo Sorrentino, l’étalage de vulgarité s’y parant de fulgurante beauté… On y ajoutera, pour faire bonne mesure, un panorama de la production suisse du moment, témoignant d’une belle vigueur documentaire. Ainsi de Walden, de Daniel Zimmermann, reconstituant en plans-séquences méditatifs dénués de paroles, une filière du bois conduisant de l’Autriche au Brésil, manière de questionner les logiques (?) économiques à l’oeuvre dans le monde globalisé, mais aussi de Subito – Das Sofortbild, de Peter Volkart, reconstituant de stimulante façon l’histoire du Polaroid…

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